« Non aux moustiques génétiquement modifiés », c’est le cri de cœur d’une association de Veille citoyenne regroupant une quarantaine d’associations. Cette association est vent debout contre les activités biotechnologiques du projet Target malaria au Burkina Faso. Au cours d’une conférence de presse, ce jeudi 30 juin 2024 à Ouagadougou, ce regroupement d’organisations a demandé l’arrêt des activités biotechnologiques du projet Target Malaria au Burkina Faso.
Selon cette association de veille citoyenne, le projet Target malaria s’apprête à « effectuer une deuxième phase de lâcher d’une deuxième souche de moustiques ». Pourtant, se désole-t-elle, les résultats des premiers lâchers de moustiques génétiquement modifiés à Bobo-Dioulasso en 2019 ne sont pas « encore » disponibles pour le public. « Nous avons fait une demande de ces résultats à l’Agence nationale de bio-sécurité. Ils nous ont dit que les résultats sont à propreté intellectuelle et destinés uniquement à Target malaria », ont-ils dénoncé, car pour eux, ces résultats doivent être rendu public.
« Nous ne faisons pas un lien entre les lâchers de moustiques génétiquement modifiés et l’épidémie de la dingue. Mais à chaque fois qu’il y a eu des moustiques génétiquement modifiés lâchers, il y a eu des épidémies de dingue. C’est le cas du Brésil et du Burkina Faso. Nous sommes en droit de nous poser des questions. Pourquoi c’est à Bobo-Dioulasso où les moustiques génétiquement modifiés ont été lâchers et c’est cette même ville qui a été l’épicentre de la dingue ? Ceci explique cela ! », s’est défendu Ali Tapsoba, membre de cette association.
À en croire les conférenciers, pour lutter contre le paludisme, il y a des méthodes plus simples, notamment le vaccin breveté par l’OMS et l’assainissement des villes, par exemple.
« Nous refusons d’être des cobayes. Nous ne voulons même pas qu’il y ait de nouveaux lâchers. En cas de lâcher de cette nouvelle souche, les conséquences pourraient être dévastatrices tant pour les espèces cibles que non ciblées », ont prévenu les conférenciers.
Le projet Target malaria, du « terrorisme scientifique ? »
Les conférenciers ont poussé leur inquiétude un peu plus loin. D’après eux, du point de vue de la réglementation, les expérimentations menées au Burkina Faso par le projet Target Malaria ne sont pas en phase avec la Loi n° 064-2012/AN du 20 décembre 2012 portant régime de sécurité en matière de biotechnologie prévue pour régir les OGM classiques et non de forçage génétique. Ali Tapsoba a même révélé que les expérimentations menées au Burkina Faso par le projet Target Malaria ne sont pas non plus en phase avec les conventions internationales que le Burkina Faso a ratifiées notamment le Protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques qui militent pour le respect strict du principe de précaution. En effet, ce protocole renseigne que la mise en œuvre d’un tel projet requière le consentement libre et éclairé des populations avant tout déploiement en milieu ouvert. « Si Target malaria affirme avoir consulté les habitants des localités concernées par le lâcher, cela ne saurait engager l’ensemble du pays. Même le supposé consentement au niveau local que Target malaria dit avoir obtenu, ne saurait être valable », a-t-il battu en brèche, citant plusieurs travaux scientifiques qui critiquent le projet Target Malaria : TESTBIOTECH 2023, World Health Organization, etc.
« Les gênes importées que ces moustiques ont à l’intérieur d’eux, est-ce que cette technologie ne pourrait pas un jour causer des dommages de santé sur la reproduction des humains ? Nous n’en savons rien, mais nous sommes en droit de nous poser la question vu les informations que nous avons sur le bailleur (Bill Gates, ndlr). Il y a aussi la DARPA, qui est une institution de l’armée américaine qui finance le projet. Quand des militaires d’un État s’intéressent à une recherche sur la santé pour un autre pays, ce n’est pas pour la santé. Ils ont un objectif autre. Nous sommes en droit de nous demander est-ce que l’objectif ultime, ce n’est pas de produire des armes biologiques un jour ? Il est possible d’utiliser des moustiques pour véhiculer des maladies. Donc rien qu’à travers ces deux financiers, nous avons raison d’être très inquiets des objectifs finaux du projet. Du reste, dans le contexte sécuritaire que nous connaissons, nous ne sommes pas à l’abri d’un terrorisme scientifique, si l’ennemi décidait, par exemple, d’utiliser ses moustiques comme arme biologique », a déclaré le porte-parole de l’Association de Veille citoyenne.
En outre, cette association de veille citoyenne, a demandé à l’État burkinabè de prendre ses responsabilités et de saisir de la question pour ne pas les permettre d’atteindre leur objectif funeste.
En guise d’information, le projet Target Malaria, financé là par la fondation du milliardaire américain Bill Gates, a conçu une expérimentation complexe comportant 3 phases, chacune portant sur une souche particulière de moustiques génétiquement modifiés (moustiques GM). Les deux premières phases portent sur les moustiques GM sans impulsion génétique et la dernière phase va porter sur les moustiques à impulsion génétique. C’est un projet de lutte contre le paludisme. Il vise à réduire, voire supprimer, la population de moustiques responsables du paludisme, par la manipulation génétique de moustiques. Cela a nécessité la libération dans la nature des moustiques à impulsion génétique en 2019.
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Mathias Kam
Minute.bf