Ceci est une déclaration du Balai Citoyen à l’occasion du Camp Cibal 2023. Lisez plutôt !
Mesdames et messieurs,
Chers camarades et distingués invités
Peuple fier et résilient du Burkina Faso d’hier, aujourd’hui et demain
Autorités nationales
Chers/Chères Cibals/Cibelles
La 6e édition du Camp Cibal tenue du 27 au 30 septembre 2023 dans l’enceinte du centre cardinal Paul ZOUNGRANA coïncide avec les 10 ans du mouvement le Balai Citoyen! En effet, le 25 août 2023, notre mouvement le Balai citoyen a célébré les dix ans de son existence. 10 ans dans la vie d’une nation c’est insignifiant mais dix ans pour une organisation comme la nôtre, ce sont dix longues années de don de soi. Pendant ces dix années nous avons connu des succès mais aussi des revers. Notre mouvement a marqué d’une tache indélébile l’histoire récente de notre pays. Nos leaders et nos militants ont subi calomnie, diffamations, railleries, injustices, mais nous n’avons jamais flanché, nous n’avons jamais renoncé à notre idéal, celui d’un combat pour un Burkina Faso de justice, un Burkina Faso libre et indépendant ancré résolument dans l’Etat de droit. En 10 ans de vie, nous sommes passés par toutes les émotions, le courage face au danger pendant la lutte contre la modification de l’article 37 ; l’incertitude et le sentiment d’accomplissement lors de l’insurrection populaire des 30 et 31 Octobre 2014 ; le doute et la détermination pendant la Transition de 2015 ; l’espoir et la déception avec les élections 2015.
Sous le régime du Président Roch Marc Christian Kaboré, le pouvoir et ses alliés se sont attaqués prioritairement aux acteurs crédibles de l’insurrection populaire. Le Balai citoyen dont le rôle a été déterminant dans l’avènement de l’insurrection populaire a été la cible de toutes les machinations visant nos leaders dans le seul but de nuire à notre réputation et porter un coup à notre mission de veille citoyenne. En s’en prenant aux leviers légitimes et citoyens de veille et de contrôle de l’action publique, le MPP s’est cruellement trompé de cible et s’est tiré tout simplement une balle dans le pied. Avec les actions de sabotage de la veille citoyenne, ajouté au phagocytage des partis et leaders politiques, le MPP pensait ainsi construire un pourvoir fort en affaiblissant les leviers de contre-pouvoir. C’est ainsi que le Balai s’est retrouvé parfois pratiquement seul comme sur la question de l’autorisation de sortie du Général Djibril BASSOLET pour l’extérieur.
L’avènement du MPSR est la conséquence directe de l’incompétence du régime de Roch Marc Christian Kaboré à inscrire notre pays dans le chemin de la bonne gouvernance. Cette énième intrusion de l’armée dans la vie politique du Burkina Faso vient consacrer finalement une triste réalité qui est que, notre armée en lieu et place de veiller à garantir l’intégrité du territoire pour assurer un environnement favorable à un jeu politique sain, lorgne elle-même le pouvoir politique. Sinon comment comprendre qu’au moment où le pays fait face au terrorisme, un groupe politique se créé au sein de l’armée pour prendre le pouvoir. Aujourd’hui, on peut noter avec amertume le rétrécissement des libertés sous le sceau de la guerre contre le terrorisme, des enlèvements, des intimidations, des menaces.
C’est dans ce contexte que s’est déroulé le Camp cibal 2023 qui a réuni près de 200 participants venus des différentes sections du Mouvement pour réfléchir autour du thème « Participation citoyenne de la jeunesse au suivi des politiques publiques dans un contexte de régime militaire de transition et de crise de la démocratie ». Après plusieurs jours de travaux, les Cibals/Cibelles ont fait les constats suivants :
- Sur le plan sécuritaire et humanitaire
Les résultats restent encore loin de ce que le discours a laissé espérer à l’avènement du MPSR. Toutefois, nous notons avec satisfaction que les capacités offensives de nos forces combattantes ont été améliorées avec des acquisitions importantes de matériels de guerre mais également l’augmentation des effectifs militaires et l’engagement à leurs côtés de volontaires pour la défense de la Patrie (VDP) dont les effectifs ont également été relevés. Malgré cela, les indicateurs de la reconquête du territoire national sont toujours au rouge. Le nombre de personnes déplacées internes ainsi que les infrastructures éducatives fermées ont augmenté sur la période MPSR. Les attaques terroristes n’ont pas diminué et le pays continue d’enregistrer des victimes civils et militaires. - Sur le plan social et économique
La crise sécuritaire qui touche durement les Burkinabè s’accompagne d’une crise sociale marquée par le renchérissement du coût de la vie. La politique de mobilisation de fonds endogène pour financer la guerre est une attitude de souveraineté qui mérite d’être saluée à sa juste valeur. Il en est de même de l’initiative de l’actionnariat populaire. Cependant, la multiplication des poches de taxation au profit de l’effort de guerre, qui n’est pas accompagnée par la création de richesses, impacte fortement le pouvoir d’achat des Burkinabè et aggrave la vulnérabilité économique des ménages ainsi que des petites unités de productions économiques. - Sur le plan des libertés et du respect des droits de l’Homme
Le MPSR semble avoir fait délibérément le choix d’opposer la défense des droits humains à l’impératif de la lutte contre le terrorisme. Les suspicions d’exécutions sommaires et des expéditions meurtrières contre nos propres populations civiles se sont multipliées. Sur les libertés d’une manière générale, des enlèvements et des disparitions forcées sont régulièrement enregistrées. Plusieurs leaders civils, activistes et militaires sont portés disparus sans que les autorités ne manifestent un intérêt quelconque sur leur sort. La liberté d’expression et de la presse ont connu des reculs jamais atteints. Depuis l’avènement du MPSR, la liberté de manifestation ou de réunion tout simplement est reconnue exclusivement aux organisations de la société civile qui proclament leur soutien au MPSR. - Sur le plan de la diplomatie
Nous notons une grande offensive sur le terrain des relations internationales. Dénonçant le jeu trouble de la France dans la lutte contre le terrorisme, plusieurs accords de coopération sur le plan militaire ou économique ont été dénoncés. Le Balai citoyen qui a adopté une plateforme revendicative depuis 2013 dans laquelle il appelle au départ des armées étrangères du Burkina Faso, ne peut que saluer cette nouvelle politique qui s’inscrit dans la lutte pour l’indépendance totale et effective de notre nation. Notre enthousiasme rencontre toutefois un bémol, la tendance à substituer un impérialiste par un autre avec lequel des contrats sont conclus dans l’opacité. Pour le Balai citoyen qui s’inscrit dans la vision Sankarariste de l’impérialisme, il n’y a pas de choix à faire entre deux Etats impérialistes mus chacun par ses intérêts. - De la cohésion interne entre Burkinabè
La volonté de créer une plus grande cohésion entre Burkinabè a du mal à se concrétiser. Pire, nous constatons que les fractures ont été exacerbées. Les Burkinabè sont divisés en pro ceci ou pro cela et les autorités ont même franchi le rubicon en désignant certains de nos compatriotes comme des « apatrides » et en proclamant qu’elles « ne cherchent pas à rassembler » (Cf. discours PM).
Le mouvement constate également une récurrence d’informations officielles sur des complots contre la sûreté de l’Etat, des tentatives de déstabilisations du pays et de putsch. Plusieurs officiers et sous-officiers sont mis en cause dans ces affaires. Cette situation n’est pas propice à la cohésion et à l’unité nécessaire au sein de l’appareil sécuritaire et de défense dont les seuls objectifs doivent être la reconquête de l’intégrité du territoire.
De tout ce qui précède, le bilan de la transition militaire reste globalement mitigé et en deçà des attentes de reconquête du territoire, de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption. Le Balai citoyen suit avec la plus grande attention ces moments difficiles faits de doutes et d’espoirs. C’est pourquoi le Balai citoyen reste très préoccupé par la situation nationale marquée toujours par une crise sécuritaire aigue et une situation humanitaire des plus préoccupante. Au terme de leurs travaux, les participants ont formulé les recommandations suivantes :
- La nécessité pour les autorités de la Transition d’instaurer un cadre national de dialogue qui repose sur la raison, la clairvoyance, la précision et la sagesse. Ce cadre, désigné sous le nom de « conférence nationale souveraine », ne peut être couronné de succès que s’il est dirigé de manière incontestable par des entités morales dignes de confiance et des légitimités sociales intègres qui dépassent les affiliations institutionnelles et politiques. Elles doivent réexaminer profondément l’État dans toute sa profondeur, avec un engagement total envers la vérité et une détermination à agir.
- Les autorités de la Transition doivent intensifier les efforts pour répondre de manière urgente et efficace aux besoins des personnes déplacées internes, en veillant à leur sécurité et à leur accès aux services sociaux de base. Assurer le retour sécurisé des PDI.
- Le gouvernement doit mettre en place des mesures pour atténuer l’impact économique de la crise sécuritaire sur les populations, notamment en veillant à ce que les politiques d’effort de guerre n’affectent pas excessivement le pouvoir d’achat des citoyens.
- Les autorités de la transition doivent s’inscrire fermement dans le respect des Droits de l’Homme tels que voulus dans les préambules de la charte de la Transition, y compris la protection des civils, et à enquêter sur toute allégation d’exécutions sommaires ou de disparitions.
- Le gouvernement doit garantir la liberté de la presse en permettant aux médias privés et d’Etat de fonctionner sans crainte de répression, et en respectant les dispositions légales de liberté d’expression.
- Les droits à la liberté de réunion et de manifestation doivent être respectés, en permettant à tous les citoyens et à toutes les organisations de la société civile de s’exprimer et de se réunir librement dans le respect des textes en vigueur.
- Concernant les complots et les tentatives de déstabilisations présumés, le Balai citoyen insiste sur la nécessité d’une instruction judiciaire complète, transparente et impartiale afin de démystifier ces allégations et de restaurer la confiance au sein de notre appareil sécuritaire et de défense. Une telle démarche contribuerait grandement à renforcer la cohésion et l’unité au sein de nos forces, alignant ainsi nos efforts vers l’objectif fondamental de reconquête de l’intégrité de notre territoire.
Fait à Ouagadougou le 29 septembre 2023
Les participant(es)
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