La question du foncier cristallise depuis plusieurs années le débat au Burkina Faso. L’actuel ministre en charge de l’habitat, Bénéwendé Stanislas Sankara a même estimé que « le logement est une question de dignité ». Invité au café-débat sur les enjeux des réformes scolaires, initié par le Réseau des journalistes sur l’Habitat et l’Urbanisme (RJHAU) le 27 août dernier, le ministre de l’Urbanisme, de l’habitat et de la ville (MUHV), est revenu sur l’importance des réformes foncières engagées par son département.
« J’ai dit sur les radios qu’il y en a qui vendent leurs terres et lorsqu’ils vont mourir, on ne saura pas où les enterrer », a rappelé le ministre Bénéwendé Sankara, notant qu’il est de « la responsabilité de l’État » d’agir pour éviter cela. C’est donc la raison, poursuit-il, qui a conduit son département à engager des réformes dans le domaine du foncier.
« Aujourd’hui, si vous voulez faire de la promotion immobilière, ça veut dire que vous avez les moyens, vous avez les financements, vous avez des partenaires qui peuvent vous aider à construire dans l’habitat. Mais construire dans l’habitat, ce n’est pas aller à Sapouy, ce n’est pas aller dans le ziro; c’est (plutôt) construire dans les zones où les hommes vont y habiter. Voilà pourquoi on dit que cela sera dans les communes urbaines qui sont aménagées, là où il y a la population », a expliqué le ministre Sankara, devant plusieurs dizaines de personnes qui ont envahi la salle de conférence Henry Sebego du Centre de Presse Norbert Zongo à Ouagadougou, pour prendre part à ce café-débat.
Sur la question de l’habitat, le ministre a confié que la restructuration des quartiers non lotis coûtera 650 milliards de FCFA à l’État burkinabè. « Où allons-nous trouver cela? », s’interroge le ministre qui dit être « davantage outré » de voir des promoteurs immobiliers qui sont venus avec des dossiers conformes à la loi, qui ont un titre foncier mère de terrain et qui repartent sur la base de leur propriété pour reparceller en attribuant des attestations aux populations qui vivent à part dans la périphérie à Ouagadougou.
« Ces quartiers-là sont devenus nombreux. Vous avez l’eau, vous avez l’électricité (mais) vous n’avez pas de route, pas de canalisation, rien du tout. Il y en a qui ne peuvent plus accéder à leur propre cours; c’est cela qu’il faut arrêter. Et c’est simple! La (nouvelle) loi est en train d’être proposée. Nous avons revu les conditions de l’octroi de l’attribution mais nous avons dit aux promoteurs immobiliers que pour aller jusqu’au bout, nous allons leur donner un an de plus pour qu’ils se confirment à la nouvelle loi. Celui qui n’arrive pas à s’y conformer, Duralex sed Lex, son agrément tombe, et puis ceux qui peuvent vont continuer parce que nous voulons voir des maisons pousser et non des parcelles. C’est cela la philosophie de la politique d’aujourd’hui », a-t-il expliqué.
Toujours sur cette question de promotion immobilière, Bénéwendé Stanislas Sankara a révélé qu’en 5 ans, les 275 promoteurs immobiliers que compte le Burkina Faso « n’ont pas pu réaliser 2000 logements ». Pourtant, la préoccupation de l’état aujourd’hui, précise-t-il, « ce n’est pas seulement l’activité de promotion immobilière mais (aussi) de revoir toute la politique de logement, de sorte à ce que si les lotissements doivent être repris, que cela soit fait dans la transparence, dans une gouvernance financière où l’on associe les populations afin que les véritables destinataires soient ceux qui ont besoin de se loger ». « La loi 2008 a été votée dans un contexte ; nous sommes en 2021 et nous pensons que, pour le moment, il faut prendre ces mesures conservatoires », s’est-il défendu.
« Nous étions 5 000 000 d’habitants, aujourd’hui nous sommes plus de 20 000 000 à l’intérieur et 30 000 000 d’habitants avec la diaspora. Demain on sera combien ? Donc cette gestion incombe à tous, pas seulement au gouvernement, parce que le gouvernement va passer; (…) vous êtes là, il y a des enfants qui naissent, on a des générations qui viendront. C’est pour ces générations qu’il faut aujourd’hui avoir l’humilité de dire qu’on ne peut pas être plus cupide que cela pour nous accaparer la terre mère », argumente Bénéwendé Stanislas Sankara.
Dans la mise en œuvre de ces réformes, il assure que tous les acteurs seront consultés. « Voilà pourquoi nous n’avons pas peur aujourd’hui de parler à visage découvert avec les amis de la presse et cela ne nécessite pas de débat contradictoire. Appelez ceux qui veulent la contradiction, argument contre argument, et le peuple va apprécier pour voir si nous sommes pour le peuple ou si nous sommes contre le peuple », lance-t-il pour conclure.
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