jeudi 21 novembre 2024
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Burkina : Des chercheurs en semences améliorées donnent des résultats « satisfaisants »

Ces dernières années, les saisons agricoles sont de plus en plus difficiles au Burkina Faso. Des difficultés marquées par les changements climatiques mais aussi par des attaques parasitaires et autres fléaux. Des anomalies auxquelles les chercheurs de l’institut de l’environnement et de recherches agricoles (INERA) du centre de recherches environnementales, agricoles et de formation de Kamboissin (CREAF-K) s’attêlent à résoudre en tentant de trouver des variétés semencières plus adaptées. Ces 21 et 22 septembre 2022, une équipe de journalistes a séjourné avec quelques uns des chercheurs dans le centre de Kamboissin mais aussi à Bagré pour toucher du doigt les résultats de leurs recherches dans les speculations telles que le sorgho, le maïs, le riz et la banane.

Pour une première fois dans l’histoire, au centre de recherche de Kamboissin, une nouvelle variété de sorgho a été testée sur une superficie d’un demi-hectare. Selon Dr. Noufou Ouédraogo, sélectionneur sur les céréales traditionnelles notamment le sorgho et le maïs et chargé de piloter le projet, l’objectif recherché ici c’est de trouver une semence tolérante au « stresse hybride » et surtout « le striga ».

« Nous travaillons à créer de nouvelles variétés de sorgho qui s’adaptent aux différents environnements agro-climatiques du Burkina Faso. Aussi, nous travaillons à mettre en place des variétés qui sont tolérantes au stresse hybride et au striga (le striga est une mauvaise herbe qui occupe plus de 60% des superficies au Burkina Faso) ». Le striga est ce qu’on appelle « Waongo » en langue nationale mooré.

Dr. Noufou Ouédraogo, sélectionneur sur les céréales traditionnelles

Cette nouvelle variété a un cycle de 3 mois, donc tout au plus 90 jours, selon le chercheur qui est en attente actuellement d’un dernier test avant de crier victoire. « Cette variété peut être classée dans la catégorie extra-précoce. Le cycle y est, le rendement y est. Maintenant si la qualité grainière répond au besoin, ça sera une satisfaction totale », a martélé Dr Noufou Ouédraogo.

Avec cette nouvelle variété « hybride », un rendement minimum de 6 tonnes est attendu à l’hectare. Mais une précison de taille, selon le chercheur, « ces hybrides ne sont pas des OGM (Organismes génétiquement modifiés) ». Bien au contraire, « [cette variété] soigne, elle a des anti-oxydants qui permettent de lutter contre le cancer et même le diabète », a-t-il révélé.

Aussi, le travail ne se limite pas seulement au secteur agroalimentaire. Les recherches tiennent compte aussi du secteur agropastoral . « On travaille aussi pour les agropasteurs, à avoir la variété qui aura un grand nombre de feuilles vertes pour les animaux après la récolte », a ajouté Noufou Ouédraogo.

Des nouvelles variétés de riz dévoilées par les chercheurs

Un site vitrine d’une variété de riz testée à Kamboinsin (Ouagadougou)

A la suite du Dr Ouédraogo de la filière sorgho et maïs, place à un autre chercheur spécialiste de la filière riz de montrer les resultats de ses recherches. Dr Édgard Traoré est chercheur en Génétique amélioration des plantes, à la même station de recherches de Kamboinsin. Il est sélectionneur de riz au département Production végétale. Ici, il y a « les pathologistes du riz » qui travaillent pour la défense des cultures et ceux de l’unité de l’amélioration du riz dont fait partie Dr Traoré.

« Nous avons une mission qui s’aligne en droite ligne avec le plan stratégique du Centre national de Recherche scientifique et technologique (CNRST), c’est-à-dire, mettre à la disposition de nos producteurs des variétés de haut rendement et qui sont acceptées par le marché national », explique Dr Traoré.

Dr Édgard Traoré, chercheur en Génétique amélioration des plantes

Dans ce département, des variétés de semences sont produites de façon régulière et mises à la disposition de la chambre froide et ces variétés serviront de pré-base pour faire la semence de base. Tout ce processus, à en croire le chercheur riz, doit répondre à « un contexte de changement climatique mais aussi dans un contexte d’exigence de la population », en ce qui concerne la qualité du riz.

Et comme mentionné un peu plus haut, les recherches en amélioration doivent tenir compte également des pathologies. « Nous avons aussi un programme d’amélioration qui tient compte de biotique à biotique, c’est-à-dire les ennemis du riz dans la nature : les virus, les champignons et les oiseaux », a soutenu Dr Traoré.

Dans ce centre de Kamboinsin, les nouvelles variétés sont codées Kamboinsin Riz en abrégé KBR et selon les chercheurs, les tests sur les variétés sont concluants. « Les variétés que nous avons mises en service depuis 2019 et inscrites dans le catalogue régional sont des variétés résilientes qui ont un potentiel un peu plus grand que ceux qui existaient déjà », a indiqué Dr Édgard Traoré.

Pour éviter « la confusion» chez les producteurs, les nouvelles variétés ont été dénommées entre autres Massamalo ou KBR2, Naong-saame KBR4, Moui-fiida ou KBR8.

Le CREAF-K possède son propre laboratoire de fabrication de variétés de tubercules

Un champ de maïs mis en place à base de la «variété semax5»

En terme de rendement, il est prévu au minimum 8 tonnes à l’hectare avec cette variété semencière mais un rendement paysan de 6 tonnes à l’hectare est « satisfaisant », selon les chercheurs. En plus des sites vitrines du centre de Kamboinsin, les variétés sont également en test dans des localités telles que Korsimoro dans la province du Sanmatenga, Mogtedo dans le Gouzourgou, Bagré dans le Boulgou et aussi dans la partie ouest du pays.

Au centre de recherche de Kamboissin, des mécanismes ont été mis en place pour la fabrication des variétés de semences pour les tubercules (pomme de terre, igname…). Un laboratoire avec des installations à la pointe de la technologie est disponible et fonctionnel pour transplanter et micropropager des variétés de la pomme de terre. Au cours de notre passage dans ce centre, nous avons pu visiter la salle « in-vitro ».

Une salle où on multiplie les plants à partir des fragments de plants pour aller jusqu’à avoir des semences. « L’idée est venue du fait que pendant longtemps nous importions les semences de la pomme de terre qui n’étaient pas de bonne qualité. Plus de 60 à 70% des semences qui venaient d’Europe étaient contaminées par des virus après tests », a justifié Dr Bouma Neya, directeur du laboratoire et par ailleurs directeur du CREAF-K.

Selon les occupants de ce laboratoire, 13 variétés de la pomme de terre vont être micropropagées à partir des travaux de multiplication des plants. La durée d’obtention de semences à partir de ce laboratoire peut prendre une année et demi s’il n’y a pas d’incident majeur.

Une variété de « banane naine » de l’INERA testée à Bagrépôle

Les Nouvelles variétés sont transférées sur le site de Bagrépôle pour des champs écoles

Après la phase recherche sur le site de Kamboinsin, les variétés sont convoyées sur plusieurs sites à travers le pays pour être mises en pratique dans des « champs écoles ». Notre périple nous a conduits notamment sur le site de Bagrépôle dans la province du Boulgou où un site de 54 hectares a été créé par l’Agence nationale de Valorisation des Résultats de la recherche et des Innovations (ANVAR) pour « promouvoir les résultats de la recherche et les diffuser à grandes échelles », explique Moustapha Diallo, directeur de la communication scientifique de ladite instution. « Sont mises en pratique ici, uniquement les semences améliorées des chercheurs », precise-t-il.

Sur place, nous retrouvons Jean François Somé, un technicien en Agriculture de l’INERA détaché à Bagrépôle pour la supervision des champs écoles. Il nous montre quelques sites vitrines qui sont sous sa coupe.

Jean François Somé, un technicien en Agriculture de l’INERA

D’abord un champ de maïs mis en place à base de la « variété semax5 » de chez la société SEMAFOR basée à Bobo-Dioulasso. Pour un premier test avec cette variété semax5, les résultats sont sans appel. « Elle est résistante à la sécheresse et aux attaques des chenilles. Elle est aussi moins gourmande aux engrais minéraux et peut produire 8 à 12 tonnes par hectare », selon l’agent agriculteur Jean François Somé. C’est aussi un hybride avec un cycle de 3 mois.

Près de ce champ de maïs, se trouve un autre champ vitrine de banane. Ce champ a été initié à base de la variété « banane naine » de l’INERA. Une variété qui a un cycle de 6 mois et peut produire une quantité allant jusqu’à 25 tonnes à l’hectare par campagne si les conditions et l’itinéraire technique de la production ont été respectés. Selon M. Somé la variété banane naine est « rentable » et donne aussi « des fruits qui ne sont pas trop sucrés ».

Ce qu’il faut souligner, est que toutes les nouvelles variétés des chercheurs seront soumises au Service national de Semences. C’est ce service qui doit valider ou non ces variétés semencières.

Mouni Ouédraogo
Minute.bf

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