Chaque 3 mai de l’année, il est célébré la Journée mondiale de la liberté de la presse. Au Burkina Faso, le débat sur la liberté de la presse fait rage. Des opinions divergent sur l’apport de la presse dans la lutte contre le terrorisme. Dans un entretien téléphonique accordé à www.minute.bf, Atiana Serge Oulon, Directeur de publication du bimensuel l’Évènement, a déploré les « attaques » que subissent les journalistes et les médias depuis l’avènement des militaires au pouvoir, notamment le MPSR 2.
Selon le Reporter sans frontières (RSF), les conditions d’exercice du journalisme sont mauvaises dans 7 pays sur 10 et satisfaisantes dans seulement 3 pays. C’est le cas notamment au Burkina Faso (58e mondial en 2023 contre 41e en 2022), et plus généralement de la région du Sahel, qui est en train de devenir une “zone de non-information”, selon le RSF.
L’avènement du terrorisme a porté un coup à la liberté de presse
Pour Atiana Serge Oulon, Directeur de publication (DP) du journal l’Évènement, depuis la dégradation de la situation sécuritaire avec le 1er acte terroriste enregistré le 4 avril 2015 sur le sol burkinabè, la liberté de la presse a été mise à rude épreuve. Entre interpellation des gouvernants, à ne pas faire le jeu des terroristes, à l’union sacrée, et les difficultés d’accès aux sources d’information, « la liberté de la presse est malmenée », estime-t-il. Et les putschs du Lieutenant-colonel Paul Damiba et du Capitaine Ibrahim Traoré ont « davantage compliqué la situation avec un verrouillage des activités officielles », poursuit le journaliste. « L’ère du capitaine Traoré est particulièrement difficile pour la liberté de la presse avec la montée en puissance des soutiens qui s’agitent et se livrent à des attaques, des incitations à la haine et à la violence verbale et physique contre les journalistes et les médias », a déploré le DP de l’Évènement.
Le journalisme est le journalisme, précise M. Oulon. De ce fait, tranche-t-il, le journaliste doit faire son travail comme le cuisinier, l’enseignant, le cordonnier, le policier ou l’agent de l’action sociale. Mais, convient Atiana Serge Oulon, « le métier (le journalisme, ndlr) a ses règles et il faut respecter ces règles. Le journaliste doit faire tout son possible pour être professionnel. Son travail d’informer participe à l’œuvre de construction ».
Ne pas faire du griotisme comme source de malheur des journalistes ?
À en croire, Serge Atiana Oulon, les reproches faits aux journalistes sont liés au fait que les journalistes ne font pas « le perroquet. Ils ne font pas le griotisme des autorités en place ». En dehors de cela, se convainc-t-il, le professionnalisme des journalistes n’est pas remis en cause. « Il n’y a pas de critique de fond ou des cas précis de fautes ou d’erreurs ou encore d’insuffisances professionnelles contre les médias ou contre les journalistes », a souligné le DP de l’Évènement.
Du reste, explique Atiana Serge Oulon, il revient aux journalistes de lutter pour préserver leurs acquis. « La liberté de la presse au Burkina Faso est liée à la situation du pays. Il ne faut pas se leurrer, il n’y a pas d’acquis définitifs. Il faut rester aux alertes, exiger et défendre ses droits. La lutte contre le terrorisme passe aussi par le droit de savoir des populations. Ce droit s’exerce en partie à travers la liberté de la presse. Elle est fondamentale pour toute société et il est du devoir de tous d’être ferme et intransigeant pour la défendre », a-t-il conclu.
Mathias Kam
Minute.bf