Le Mouvement pour le plaidoyer du retour de la paix et de la cohésion sociale du Burkina Faso (MPCRN), qui compte plus d’une quarantaine de membres, a été présenté à la presse le jeudi 16 janvier 2020 à Ouagadougou. Selon les membres de cette initiative qui plaide pour la réconciliation nationale entre les filles et fils du Burkina Faso, « seul le dialogue national inclusif pourra définir notre modèle de réconciliation nationale acceptée par tous en tenant compte de nos réalités socio-culturelles et des diverses sensibilités nationales ».
Le Burkina Faso, relève le MPCRN, vit une crise multidimensionnelle caractérisée par l’insécurité, un climat social très critique, l’incivisme et la mise en cause permanente de l’autorité de l’Etat. « Ce climat socio-politique difficile et délétère qui, de nos jours caractérise le Burkina Faso, met constamment en péril la paix, la stabilité, la cohésion sociale et la sécurité intérieure », a déduit Safiatou Lopez/Zongo, présidente du MPCRN, qui note que « des conflits intercommunautaires sont venus aggraver la situation sécuritaire entrainant de nombreux déplacements des populations à l’intérieur de notre pays ». Cette situation, pense-t-elle, ne permet pas à notre patrie d’amorcer le développement socio-économique au début de cette décennie. « Cette crise multidimensionnelle ne garantit ni l’intégrité territoriale ni un climat d’affaires propice pour des investissements stratégiques permettant l’avancée de notre pays », déplore dame Lopez.
Ainsi, c’est dans le souci de voir tous les Burkinabè se parler, se considérer, se respecter et se réconcilier entre eux-mêmes et avec leur Histoire, qu’a été initié ce mouvement qui veut apporter sa part de contribution à la réussite de la réconciliation nationale, de sorte à parvenir à une nation viable, sans haine ni division, ni rancune, dans un Etat où les droits des citoyens seront rigoureusement respectés conformément à la loi.
Cette nécessité de réconciliation nationale est diversement partagée et appréciée par les acteurs politiques et sociaux. « C’est pourquoi, notre mouvement appelle à un dialogue national inclusif sur la réconciliation nationale afin de définir ensemble le processus consensuel pour arriver à cette cohésion sociale tant recherchée permettant ainsi de définitivement solder le passif de tous les crimes de sang, politiques et économiques », explique la présidente du mouvement, pour qui, seul le dialogue national inclusif pourra définir le modèle de réconciliation nationale acceptée par tous en tenant compte des réalités socio-culturelles et des diverses sensibilités nationales. « Ce dialogue permettra d’apporter des réponses aux questions de justice, de vivre-ensemble et de paix sociale », selon elle.
« Nous sommes tous responsables…»
Dans son intervention, Issaka Lingani, membre du MPCRN estime que « nous sommes tous responsables d’une manière ou d’une autre » de la situation actuelle que traverse le Burkina Faso. « Il n’y a pas des coupables d’un côté, et de l’autre côté, des innocents ou des juges. C’est parce qu’il y a des gens malintentionnés qui se mettent dans la peau de ceux qui sont innocents, vierges, blancs et qui n’ont rien à se reprocher, que la plupart des crises prennent de l’ampleur, tout en oubliant qu’on peut être coupable par omission, parce qu’on n’a pas eu le courage à un moment donné, de dire une injustice qui est en cours, de dire à une situation qui n’est pas désirée par l’ensemble de la société ; ou parce qu’on n’a pas eu le courage d’intervenir, on est coupable par omission », soutient-il.
Sur la question du terrorisme auquel le Burkina Faso fait face depuis quelque quatre ans, pour M. Lingani, même si la non-réconciliation nationale n’est pas à l’origine du terrorisme, cette non-réconciliation, surtout « l’absence d’unité entre les fils et les filles du Burkina Faso, constitue un frein dans la lutte contre le terrorisme ». Tout cela participe, selon lui, à ce que chacun se sente responsable de la situation, et que chacun travaille pour qu’il y ait la réconciliation.
L’expertise de Blaise Compaoré « sera la bienvenue »
La réconciliation nationale rime avec le retour de tous les exilés, disent certaines personnes. Ainsi, « Blaise Compaoré doit être là », estime Safiatou Lopez. « Nous ne serons pas heureux qu’il lui arrive quelque chose en Côte d’Ivoire », a fait noter la présidente du mouvement, qui pense que « si Blaise Compaoré peut apporter quelque chose dans ce pays, s’il a une expertise à apporter, elle sera la bienvenue ».
Pour Issaka Lingani, l’ancien président Blaise Compaoré n’est que la partie émergée de l’Iceberg, sur le nombre de personne exilées depuis les évènements d’octobre 2014. « Il y a beaucoup d’autres Burkinabè qui sont touchées dans leurs chaires par les questions d’exil. Il y a des gens au Burkina Faso ici qui, pour des raisons diverses, pas seulement politique ou politicienne, mais pour des raisons propre à eux-mêmes où à la situation nationale, sont en exil à l’intérieur de leur propre pays, parce qu’ils sont incapables de s’exiler (à l’extérieure). Il y a cette grande masse des Burkinabè qui a besoin de ce dialogue national afin de retrouver une place au sein de l’ensemble du dispositif national. Tous ces gens sont concernés mais on n’en parle pas. On ne fait cas que de Blaise Compaoré, Yacouba Isaac Zida, etc. », explique-t-il.
Armand Kinda
Minute.bf