Dans cet entretien accordé à votre organe Minute.bf, l’ambassadeur de la République populaire de Chine au Burkina Faso, Li Jian est revenu sur la reprise des relations entre la Chine et le Burkina Faso, la construction de l’hôpital de référence à Bobo Dioulasso qui a fait de gorges chaudes, les sujets d’actualité internationale, l’appui de la Chine au Burkina dans la lutte contre le terrorisme, etc. Sur ce dernier point qui concerne la lutte contre le terrorisme, Li Jian a fait trois propositions qui devraient, selon lui, être prises en compte dans ce long combat contre les « forces maléfiques ».
Minute.bf : Le Burkina Faso a mis fin à ses relations diplomatiques avec Taiwan en mai 2018 et a établi des relations diplomatiques avec la République populaire de Chine. Comment la relation entre les deux pays s’est-elle développée au cours de la dernière année ?
Il faut dire que la relation bilatérale entre le Burkina Faso et la Chine est une relation caractérisée par un sens fort stratégique, par une complémentarité, de la substantialité et par une vivacité qui porte plein d’espoir pour l’avenir. En moins de deux ans de coopération, la confiance mutuelle au sens politique s’est bien consolidée. Nos deux pays partagent les mêmes visions sur tous les grands thèmes, sur des sujets internationaux et régionaux et surtout sur les grands sujets de développement et pour le multilatéralisme. On se soutient sur l’arène internationale, ou bien au sein des Nations-Unis en ce qui concerne les candidatures que nos différents gouvernements y proposent. C’est une relation marquée également par la complémentarité économique. Ici au Burkina Faso, les populations consomment beaucoup de produits chinois. Nos produits sont entrés dans les habitudes de consommation des burkinabè. Le Burkina exporte également vers la Chine des produits agricoles tels que le coton, le beur de Karité, le sésame, etc. Des produits déjà bien adoptés par les consommateurs chinois. A titre illustratif, pour l’année 2019, le chiffre des échanges commerciaux s’élevait jusqu’à plus 300 millions de dollars US. Cela dénote d’une vivacité des échanges entre les deux pays.
S’il y a un autre caractère qui démontre la dynamique de nos relations, c’est bien le brassage des populations. Quand on renouait nos relations avec le Burkina, il y avait un peu moins de 150 ressortissants chinois au Burkina. Actuellement il y en a plus de 500. De même, dans la ville d’Îvou, une ville qui fait le grand commerce avec un rang mondial, il y a une petite communauté d’hommes d’affaires burkinabè composés de plus de 25 personnes qui vivent là-bas et qui constituent un pont, ou un lien inséparable avec les commerçants au Burkina. Egalement, pour les échanges de personnel, plus de 800 fonctionnaires burkinabè ont été envoyés en Chine pour être formés sur différents thèmes et sujets, et qui pourront s’inspirer de l’exemple chinois afin d’améliorer la situation économique et sociale du Burkina.
Je voudrais également aborder un tout autre pan de notre coopération, c’est le caractère substantiel de nos relations bilatérales, précisément sur le plan de l’éducation. Pour illustrer cela, j’ai bien envie de partager avec vous une expérience que j’ai vécue. J’ai en effet, à une occasion, accompagné le président du Faso pour inaugurer les cent écoles construites à travers notre accompagnement pour remplacer les écoles sous paillotes. Trois ou quatre mois après, au côté du Ministre Stanislas Ouaro, nous sommes repartis sur les lieux et nous avons pu voir des écoles qui étaient sorties de terre. A notre arrivée, le fait de voir la joie sur les visages des enfants qui se sont réunis devant nous pour l’accueillir était une véritable joie pour moi. C’est là une relation qui peut aider à changer l’avenir des enfants burkinabè.
Sur le plan sanitaire, la Chine a déjà envoyé deux vagues d’équipes médicales au Burkina. La troisième vague vient d’arriver. Ces équipes sont basées à l’hôpital de Tengandogo mais interviennent aussi dans les endroits reculés du pays, notamment dans les campagnes où ils font des consultations gratuites. Aujourd’hui, plus de mille personnes ont bénéficié de ces consultations gratuites. Aussi, par deux fois, l’on a invité au Burkina Faso, l’action lumière, (un projet qui fait des opérations chirurgicales gratuites pour le traitement de la cataracte) pour mener des opérations contre la cataracte. On a pu rendre visite à des personnes qui ont bénéficié de ces opérations. Pour la plus part des personnes âgées qui ont bénéficié des opérations contre la cataracte, l’on pouvait lire la délivrance sur leur visage. Je pense que c’est un bonheur qui touche tout le monde. A mon entendement, ce type de collaboration entre le Burkina et la Chine est un modèle de relation qui permet d’améliorer la qualité de vie des populations.
En ce qui concerne l’agriculture, je pense que le gouvernement chinois a accordé des politiques très particulières, spécifiquement au Burkina Faso par rapport aux autres pays africains. Dans les autres pays par exemple, il y a tout au plus une seule équipe chinoise qui travaille dans le domaine agricole. Au Burkina il y en a deux. Il y a une équipe qui travaille pour les aménagements hydro-agricoles pour ce qui concerne surtout le riz et une autre équipe qui travaille spécifiquement pour le mil. Nos experts présents au Burkina ont beaucoup réalisé dans leur domaine. Par exemple pour le riz, à travers les essais, ils ont réussi la prouesse d’atteindre environ une production de 6 tonnes à l’hectare. Pour ce qui concerne le mil, les experts chinois ont déjà réalisé un rendement d’environ 4,1 tonnes à l’hectare par rapport à 0,65 tonnes à l’hectare originairement. Je pense que l’appui de nos experts et avec la volonté de poursuivre dans la bonne direction, le gouvernement chinois va beaucoup apporter dans la résolution du problème de sécurité alimentaire au Burkina.
Ce que je voudrais dire aussi par rapport aux relations sino-burkinabé, c’est que c’est une relation qui demande du temps, qui demande de la patience mais aussi de l’amélioration. Un an et demi de relation, il faut reconnaitre qu’on est juste au début de notre reprise diplomatique. On demande beaucoup d’efforts de notre part ; nos experts, dans bien de domaines sont sollicités pour apporter leur expertise et leur contribution technique. En retour, on espère avoir un environnement beaucoup plus ouvert, beaucoup plus tolérant, beaucoup plus accueillant. Il faut quand même un environnement favorable pour attirer et permettre aux investisseurs chinois de s’installer ici au Burkina pour donner plus de dynamisme à l’économie et au marché favorable. C’est là aussi, un de nos plaidoyers. Tout compte fait, en tant qu’ambassadeur, je pense que nos relations avec le Burkina à tous les niveaux d’interventions doivent avoir le consensus des différentes couches sociales, politiques et ethniques au Burkina. C’est dans ce sens que nous aurons une coopération durable, une coopération fructueuse et à long terme.
Minute.bf : Quand vous parlez d’environnement favorable aux investisseurs chinois, quelles sont les faveurs que vous attendez des autorités burkinabè ?
Sur ce point, j’aimerais donner un petit exemple. Nous avons une vingtaine d’entreprises qui travaillent dans le domaine des infrastructures. Elles espèrent bien venir ici pour apporter leurs expertises et leurs réalisations. Cependant, depuis plus d’un an ils postulent sans succès au marché d’appel d’offre de la construction des infrastructures. De leur plainte auprès de notre ambassade, il ressort que ce n’est pas facile de mener la compétition avec les partenaires locaux mais aussi avec les anciens partenaires du Burkina. Il est vrai que je leur ai demandé de bien s’adapter aux règles légales, améliorer leur condition pour gagner des marchés. Seulement, l’effort doit se faire au niveau des deux parties mais pas seulement de notre partie.
Minute.bf : Vous dites vouloir les mêmes types de relations avec les différentes couches ethnique et politique au Burkina mais l’opposition trouve que vous travaillez beaucoup plus en faveur du parti au pouvoir…
La reprise des relations diplomatiques a été impulsée par ce gouvernement, décidée par le président Roch Marc Christian Kaboré et nous sommes un pays socialiste, avec le parti communiste qui reste au pouvoir. Pour nous, lorsque les relations diplomatiques sont bien établies avec un pays, dans le même temps, le parti communiste établi un lien officiel avec le parti au pouvoir. Pour nous, c’est quelque chose de naturelle. Il y a même des coopérations entre le parti communiste chinois qui a plus de 90 ans d’expérience et le MPP qui compte s’inspirer du parti communiste chinois. Cela n’a rien avoir avec de l’ingérence dans les affaires internes d’un autre pays.
Minute.bf : Monsieur l’ambassadeur, la plus part des Burkinabè qui séjournent en chine, sont stupéfaits de la discipline du peuple chinois. Est-ce que la discipline à elle seule explique le miracle chinois ?
Il est vrai que la discipline est le mot le plus partagé par des Burkinabè qui ont une expérience de séjour en Chine. C’est vrai que la discipline a compté pour beaucoup à l’évolution de la Chine actuelle. Mais la discipline seule n’a pas suffi pour atteindre ce niveau. La Chine, il convient de le dire, un peu plus de quarante ans avant était au même niveau de développement que la plupart des pays africains mais déjà à partir de 2010, la Chine était déjà classé deuxième puissance économique mondiale. Nous avons réussi à trouver une voie qui est bien adaptée à notre culture, à notre histoire. Aussi, notre président Xi Jinping a bien déclaré que la Chine est disposée à accompagner les pays africains par le partage sans aucune réserve de son expérience pour aller vers le développement.
Revenant à la discipline, pour nous, au niveau de la gouvernance nationale, c’est tout d’abord une question de vision. Il faut toujours garder une continuité dans la politique de développement. A la suite de cela, il faut avoir une mobilisation générale autour de la politique de développement et de la vision impulsée pour le développement du pays. Au niveau de l’administration locale, le premier élément qu’il faut vraiment souligner c’est la loyauté. La loyauté au pays, la loyauté dans l’exécution de la politique générale impulsée par le gouvernement central. Aussi, il faut avoir un esprit d’ouverture pour attirer tout genre de ressources extérieures.
Au niveau des citoyens, il faut une discipline absolue et un dévouement total. Ce que j’ai remarqué, c’est que tout le monde veut le changement, mais personne n’est prêt à changer par lui-même. En Chine les citoyens ont toujours une envie de changer par eux-mêmes pour améliorer leur condition de vie et celle des autres. C’est là, quelques éléments que je voulais partager avec vous.
Minute.bf : Le Burkina Faso était le seul pays ouest africain qui entretenait des relations bilatérales avec Taiwan et c’est désormais un passé. Aujourd’hui, qu’est-ce qu’on peut noter en terme de diplomatie ?
Pour cette question, j’aimerais partager avec vous une histoire. A mon arrivée ici j’ai eu des discutions avec des anciens diplomates du Burkina aux Nations-Unies. Ces diplomates m’ont dit à quel point il était embarrassant d’être opposé à la Chine et en même temps avec d’autres pays africains dont des pays voisins. Puisqu’à l’époque, le Burkina était avec une quinzaine de pays seulement avec l’île de Taiwan. Maintenant tout ça est fini. Cette reprise des relations a mis fin à deux décennies de condition anormale. Nos deux pays reviennent plutôt à une condition normale à savoir la reprise de leur relation diplomatique. C’est aussi une victoire pour les deux peuples et à 180 pays du monde et à la communauté internationale qui adhère au principe d’une seule Chine.
Minute.bf : L’Hôpital de Tengandogo est une œuvre de Taïwan. Vous avez repris les relations avec le Burkina Faso. Est-ce qu’il y a des actions que vous avez posées au niveau de cet hôpital qu’on peut aujourd’hui noter comme investissement de la République populaire de Chine en faveur du Burkina Faso ?
C’est une question qui tient à cœur beaucoup de personnes. Sur le plan sanitaire, dans le domaine des infrastructures de la santé, le gouvernement chinois attache beaucoup d’importance à bien réaliser ses engagements avec ses amis burkinabè. Le Centre hospitalo-universitaire (CHU) Tengandogo est un hôpital bien conçu et bien construit. C’est même le lieu de travail de notre troisième équipe de médecins. Ils ont mené beaucoup de relations amicales et professionnelles avec leurs collègues de cet hôpital. Nous avons déjà établi des objectifs pour la mise à jour du système informatique de cet hôpital, pour l’amélioration des conditions de travail dans le but de bien élever son taux d’efficience.
Nous avons d’autres projets comme l’hôpital que nous avons envisagé de construire gratuitement à Bobo-Dioulasso. C’est un CHU. Ce sera aussi un projet phare pour nos relations. Avec les discussions qu’il y a eues autour du site qui avait été choisi pour la construction de ce CHU, nous attendons maintenant la décision finale du gouvernement burkinabè. Le gouvernement chinois, quant à lui, reste toujours ouvert. Nous sommes prêts à bien déclencher les travaux aux côtés du gouvernement burkinabè pour réaliser cette infrastructure dans de brefs délais afin d’apporter notre soutien aux Bobolais d’abord et aux Burkinabè en général.
Minute.bf : En ce qui concerne l’hôpital de Bobo Dioulasso, est-ce que vous êtes prêts aujourd’hui à changer de site si le gouvernement burkinabè vous en proposait un autre au lieu de la forêt de Kua ?
Nous attendons toujours la décision finale du gouvernement burkinabè. Si le gouvernement décide d’un autre site, nous reprendrons le processus. Mais, si le site est bien maintenu, nous allons travailler à la protection de l’environnement et des nappes d’eau souterraines. Chez nous en Chine, nous avons construit environ 2000 hôpitaux équipés de plus de deux milles lits. Il y a aussi des hôpitaux qui ont été construits dans la montagne. Nous avons suffisamment de l’expertise et de l’expérience à bien maintenir l’équilibre entre la construction et la protection de l’environnement.
Mais s’il y a un changement de site, il nous faudra réexaminer les conditions de construction pour parvenir à un plan ou à une solution fiable pour donner un élan à ce projet.
Il faut rappeler que l’hôpital de Koudougou a été construit par le gouvernement chinois depuis les années 80. Nous aimerions aussi inclure l’amélioration de cet hôpital dans nos projets. Cela est en cours de discussion avec nos partenaires du ministère (santé) et l’hôpital. Nous espérons que tout se passera vite, en même temps avec les autres hôpitaux.
Nous avons aussi le projet sur les Centres de santé et de promotion sociale (CSPS). Là aussi, nous sommes en train de discuter pour voir dans quel cadre nous pouvons apporter notre soutien pour donner une couverture généralisée sur les CSPS. Il y a encore un autre investissement sur les ressources humaines. Nous voulons mettre l’accent sur la formation des médecins. Il y a déjà des universités de médecine qui nous ont donnés leurs accords à recevoir les étudiants ou les médecins d’ici pour leur permettre de bien suivre les formations en Chine.
Minute.bf : Le Burkina Faso est confronté à une crise sécuritaire depuis quelques années. Les attaques se multiplient et endeuillent chaque jour des familles burkinabè. Comment la Chine peut aider le pays des Hommes intègres dans cette lutte contre le terrorisme ?
Cela fait partie d’un volet très important pour une relation bilatérale, c’est-à-dire une coopération dans un domaine de la sécurité et contre le terrorisme. Je pense que la coopération doit reposer sur quatre volets. Le premier, c’est la formation. Des gendarmes et des policiers burkinabè ont suivi des formations en Chine. Nous aimerions poursuivre ces genres de formations en accueillant plus d’élites en Chine, qui viendront renforcer leur capacité dans la lutte contre l’hydre terroriste. Le deuxième volet concerne l’équipement. Sur ce point, à la demande du gouvernement burkinabè, la Chine est en train d’examiner la possibilité de bien préparer des équipements qui correspondent aux besoins urgents de l’armée burkinabè.
Le troisième point concerne la question diplomatique. Le plan chinois est d’œuvrer au côté du gouvernement burkinabè pour supporter tout genre de plaidoyer au sein des Nations-Unies et surtout, inclure les forces conjointes du G5 Sahel sur l’article 7 de la Charte des Nations-Unies. Aussi, pour toutes les assemblées générales des Nations-Unies, lorsque le G5 Sahel prononce un discours sur nos soutiens internationaux, le représentant chinois est toujours en première ligne pour apporter notre appui. Le quatrième volet concerne l’humanitaire. Sur cette question, le peuple chinois a déjà offert 1 million de dollar US en devise et 5000 tonnes de riz au gouvernement burkinabè pour soutenir les déplacés internes. Nous envisageons également une autres séance de don en matériels pour améliorer les conditions de vie de ces déplacés internes.
Minute.bf : La chine a été, dans le passé, confronté au même problème de terrorisme, notamment à Xinjiang. Actuellement, les médias occidentaux critiquent beaucoup la politique chinoise dans cette localité. Quelle est la réalité des faits ?
Le mensonge reste le mensonge même s’il est répété mille fois. La situation est totalement différente de la description que font les médias occidentaux sur la question. Cela n’a rien à voir avec des problèmes de droits de l’homme, de religion ou de discrimination ethnique. Pour nous, il s’agit d’un problème antiterroriste, anti-extrémiste et anti-séparatiste. Ce sont les trois forces maléfiques. Je pense que nos réalités aujourd’hui diffèrent un peu des vôtres. Il y a presque dix ans, dans le chef-lieu de Xinjiang, il y avait des scénarios très tragiques. Des voisins qui s’entendaient très bien se battaient ; il y avait toujours des violences qui arrivaient un peu de partout. Depuis lors, le gouvernement central et celui local ont mené des coopérations et ont pris des mesures strictes selon les lois chinoises pour venir à bout de ces trois forces maléfiques. Avec cette mesure, nous avons des résultats probants. Maintenant, la région autonome de Xinjiang est devenue la région la plus sécurisée en Chine. Depuis 2019, nous avons reçu 150 millions de touristes. Il y a eu plus de mille journalistes occidentaux qui ont déjà bien visité Xinjiang. Ils ont vécu dans un environnement stable, sécurisé et très dynamique, surtout dans une harmonie ethnique.
Les médias occidentaux ont beaucoup critiqué notre formation, leurs gouvernements ont fait pareil. Mais notre formation était organisée sur trois connaissances. Nous avons encouragé les jeunes à bien apprendre les lois et règlements ; apprendre les techniques, les expertises et apprendre la langue, de sorte à ce qu’à la fin de la formation, ils aient la capacité de trouver un emploi ou de créer leurs propres emplois. C’était notre objectif qui a été bien atteint.
Minute.bf : Vous avez fait savoir que vous allez soutenir le Burkina Faso dans la lutte contre le terrorisme. Vous avez pu bien lutter contre le terrorisme à Xinjiang. Au Burkina Faso, quelle sera la stratégie que vous adopterez ?
Nous ne sommes pas un donneur de leçon. Nous sommes juste un partenaire sur un pied d’égalité. Ce qui est chez nous est un succès. Nous pouvons toujours partager notre réflexion. Je pense qu’il faut une mobilisation totale du peuple. Tout le monde doit connaitre la conséquence négative du terrorisme. Ensuite, pour mener une action d’éradication de ce fléau, il faut la connaissance généralisée. Connaitre ce qu’est le terrorisme, connaitre la vérité. Le troisième point qui est plus important, c’est le développement. Il faut donner l’espoir au peuple de bien vivre ensemble, dans l’unité et la cohésion.
Minute.bf : Le grand projet qui tient à cœur votre président, c’est l’initiative « La Ceinture et la Route » qui serait une réactivation de la roue de la soie. Un grand projet qui doit profiter à tous les pays et plusieurs pays africains sont parties prenantes. Est-ce qu’il vous plaira de nous présenter ce programme et la part qui sera consacrée au Burkina Faso ?
Li Jian : La ‘’Ceinture et la route’’ est une initiative lancée par notre président Xi Jinping lors de sa visite au Kazakhstan depuis 2013. Cela fait environ six ans que cette initiative a été bien accueillie presque par tous les pays le long de la ‘’route de la soie’’ ou la route maritime de la soie. Il y a déjà beaucoup de fruit très probant avec cette initiative puisque, c’est plutôt une plateforme de coopération ou un mécanisme dans un esprit ouvert à tous les pays qui partagent les valeurs de ‘’consulter ensemble, construire ensemble et partager ensemble’’. C’est aussi un mécanisme de financement. L’implication des pays africains dans cette initiative à un sens historique parce que la route de la soie s’étend le long de la côte Est de l’Afrique. Tous les pays qui monteront leur bonne intention de participer à cette initiative, nous examinerons la possibilité. Le gouvernement chinois a déjà signé presque 200 mémorandums dans le cadre de la ceinture de la route avec plus de 130 pays souverains. Nous sommes sûrs que le Burkina Faso fera partie de ces pays bénéficiaires. Actuellement, nous discutons de la possibilité de pousser en avant ce genre de processus.
Cette initiative a pour but de changer beaucoup sur la configuration économique et sociale des pays africains. Nous avons déjà des résultats très encourageants. En exemple, le chemin de fer du Kenya qui relie la capitale à son port Mombassa. Nous voudrions bien encourager les pays africains à participer à cette initiative. C’est ainsi que nous trouverons ensemble des solutions pour construire ensemble cette initiative pour permettre à beaucoup de personnes de bien en profiter.
Minute.bf : Quand vous parler de construire ensemble et de partager ensemble, à quoi faites-vous allusion ? De quoi s’agit-il exactement ?
Li Jian : Nous avons bien réfléchi pour faire enrichir cette initiative depuis le début. Il faut dire que ce n’est pas quelque chose qui est bien contrôlé par le gouvernement chinois. Ce doit être un outil, un produit où doivent converger toutes les ressources et toutes les volontés des pays bénéficiaires ou participants. C’est pourquoi nous parlons de la valeur de ‘’consulter ensemble’’. C’est dire que, s’il y a un projet ou quelques possibilités, il faut toujours demander l’accord des deux parties, il faut toujours avoir l’appui absolu du pays local. Ensuite, de la valeur de construire ensemble, il ne s’agit pas seulement du donner et du recevoir. Il faut toujours avoir une implication de toutes les parties concernées. Partager ensemble, c’est simple. Si le projet porte des fruits, il doit bénéficier à toutes les parties.
Minute.bf : Il y a les soutiens que la Chine apporte au Burkina Faso. Mais, la question que se posent beaucoup de Burkinabè, c’est de savoir ce que le Burkina Faso offre en retour à la Chine. D’aucuns parlent d’une autre forme de décolonisation. Quelles réponses pouvez-vous apporter à ces interrogations ?
Pour une relation entre les pays souverains, ce n’est pas seulement du donnant-donnant. C’est-à-dire, une relation bilatérale où on parle seulement de commerce, toujours sur l’arène des marchandises. Pour nous, une relation bilatérale normale, c’est tout d’abord une relation sur un pied d’égalité. C’est le principe de la diplomatie de la Chine. Nous traitons tous les pays d’Afrique, qu’ils soient grands ou petits, sur un même pied. Nous traitons tous les pays africains comme nos premiers partenaires puisque nous partageons la même histoire. Nous partageons la même aspiration de devenir encore plus fort pour réaliser notre rêve de développement.
Aussi, peut-être que les gens diront qu’au Burkina Faso, l’on n’a pas grand-chose à échanger avec la Chine. Mais il faut comprendre qu’entre les deux pays, ça rime déjà une complémentarité entre les deux entités économiques. Nous apportons notre soutien, ce qui est fort possible de contribuer à bien enclencher le processus d’industrialisation du Burkina Faso. Surtout, élever la capacité de transformation des produits agricoles à un processus de commercialisation en vue de faire bénéficier beaucoup d’agriculteurs. Je pense que beaucoup de paysans ou de jeunes burkinabè auront, dans le futur, plus de possibilité de bien profiter de cette relation amicale, fraternelle et fructueuse.
Minute.bf : Cela fait plusieurs mois qu’il y a des manifestations à Hong-Kong. Comment pouvez-vous expliquer ces troubles aujourd’hui ?
Pour le moment, la situation de Hong Kong est revenue un peu à la normale. Il y a une certaine accalmie actuellement par rapport à la situation de violence qui prévalait. En plus, je pense que tous les habitants de Hong Kong ont beaucoup souffert. Ces manifestations avec des actions de tout genre, parfois très violentes, durant plusieurs mois n’ont rien de favorables pour les intérêts de personne. Ces mouvements ont commencé à partir d’un acte criminel qui a été produit par un habitant hongkongais. Cet habitant a fait un assassinat sur l’île de Taïwan avant de trouver refuge à Hong Kong. Mais, entre Hong Kong et Taïwan, surtout pour notre région spéciale administrative, il n’y a pas ce genre de mécanisme pour faire l’extradition.
Justement, pour combler les lacunes de la loi, le gouvernement local a fait savoir qu’il appartient au gouvernement de la région spéciale administrative de Hong Kong de déclencher une notification de la loi pour inclure ces genres de phénomènes, afin de perfectionner leur mécanisme judiciaire. Mais, il y a toujours l’opposition politique dans la région, assistée par des forces extérieures qui a profité pour mobiliser les gens dans la rue et élargir le phénomène qui a transformé les manifestations en actions criminelles très violentes.
Mais, avec nos efforts, surtout les efforts du gouvernement central et du gouvernement local, beaucoup d’actions ont été menées pour apaiser la situation. Maintenant, nous comptons toujours sur les policiers de Hong Kong, le gouvernement local et surtout les habitants de la ville pour rétablir l’ordre et stopper la violence. C’est le plus important. Hong Kong est une cité qui, actuellement, a de l’avenir. C’est une ville très importante sur les plans économique, financier et commercial pour la Chine et au niveau mondial. Si Hong Kong est paralysé par ces genres d’actions, cela ne servira aux intérêts d’aucune des parties. Actuellement, même les opposants ont déjà bien compris les dessous de la situation et pour nous, le plus important, c’est de garantir la stabilité de Hong Kong et de trouver des solutions pour éviter le pire.
Minute.bf : Revenons à une question d’actualité : après plus d’une année de friction commerciale, la Chine et les Etats-Unis sont parvenus à un accord. Est-ce que ce premier pas va mettre définitivement fin à cette guerre commerciale qui a été préjudiciable à l’économie mondiale ?
Li Jian : On a pour habitude de parler de guerre commerciale. Non, c’est plutôt un litige entre les deux pays qui sont en effet les deux premières puissances économiques au plan mondial. Il faut savoir que le volume d’échanges commerciaux entre ces deux pays est estimé à plus de 600 milliards de dollars américain par an. Par ailleurs, Il faut dire que c’est dans un respect mutuel et dans un esprit de dialogue que les deux parties sont parvenues à un premier accord apaisant le litige. Ainsi la première phase de cet accord a déjà été signée. C’est vraiment un grand soulagement non seulement pour nos deux pays mais aussi pour l’économie mondiale qui pouvait subir lourdement les conséquences de ce litige si cela perdurait. Pour l’heure, les deux parties sont en train d’évaluer la situation tout en restant ouvertes à la négociation. On espère que l’économie mondiale ne souffrira plus de ce type de litige.
Minute.bf : Nous apprenons par les médias, l’apparition d’un nouveau virus en Chine, le coronavirus, apparu à Wuhan dans le centre de la Chine et qui se propagerait dans le nord à Pékin et dans le Shenzhen. On apprend également par ces médias que le virus se transmet d’Homme à Homme. En ce moment, près 198 nouveaux cas auraient été détectés. Qu’en est-il réellement ?
Li Jian : Selon les dernières mises à jour effectivement, les autorités chinoises ont dénombré près de 440 cas confirmés par l’atteinte de ce nouveau virus dénommé coronavirus. Un virus découvert en Chine. Ce qu’il faut noter c’est que le gouvernement chinois accorde beaucoup d’importance dans la gestion de cette épidémie causée par le virus. Des mesures les plus strictes ont déjà été mises œuvre au niveau national, au niveau du gouvernement local et même au niveau communal. La première mesure a consisté à la prévention et au contrôle strict de la population en isolant les zones touchées. Pour la deuxième mesure, il y a eu une mobilisation générale au sein de la nation qui s’est matérialisée par le contrôle des accès et des sorties des régions touchées. Certaines régions touchées ont même été déconseillées. A part la prévention et le contrôle, la Chine s’attèle également au traitement des personnes touchées par le virus. Pour cela, tous les hôpitaux sont déjà mobilisés et plusieurs patients ont d’ores et déjà été consultés et soumis à des traitements. Troisièmement, la Chine garde une collaboration très étroite avec l’Organisation Mondiale de la Santé, elle coopère et dans un souci de transparence, elle partage les informations nécessaires sur l’épidémie.
Pour terminer je vais vous rappeler qu’il y a plus de 16 ans, la Chine avait également connu une épidémie due au virus SRAS. Un virus qui a été plus violent que celui qu’on peut voir actuellement mais le peuple chinois a pu surmonter cette difficulté. Pour cette fois-ci, le peuple chinois est convaincu qu’il viendra à bout de cette hydre épidémique.
Minute.bf : Nous sommes à terme de notre entretien, avez-vous un dernier mot ?
Li Jian : Je dis merci à vous, nos amis de la presse, puisque c’est un entretien qui touche presque tous les sujets d’actualités. Nous comptons aussi sur vous pour bien porter de bons messages pour nos relations déjà jeunes qui ont besoin d’une attention particulière pour connaitre une évolution significative. Nous comptons sur vous pour aussi établir la confiance entre les deux peuples et le bon sens entre les deux peuples pour maintenir le cap de nos deux relations. Nous espérons que ces genres d’échanges deviendront une bonne tradition entre l’ambassade et nos amis des medias. Je vous remercie !
Propos recueillis par Hamadou Ouédraogo
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