Dans le cadre de ses opérations de contrôle qualité, l’Agence burkinabè de Normalisation, de la Métrologie et de la Qualité (ABNORM) a, du 26 décembre 2023 au 14 janvier 2024, saisi des centaines de tonnes de fers à béton de « qualité douteuse ». Le point de ces opérations de contrôle qualité des fers à béton à Ouagadougou a fait l’objet d’un point de presse, le vendredi 19 janvier 2024 au siège de l’institution.
Au Pays des Hommes intègres, « il n’est pas rare de voir des infrastructures s’écrouler ou des ouvrages emportés à la survenance de la moindre intempérie ». Cela, de l’avis d’une certaine opinion, est, en partie, le fait « de la mauvaise qualité des matériaux de construction, notamment les fers à béton vendus sur le marché ».
Partant, conformément à sa mission de surveillance du marché et « sur la base des renseignements précis », l’Agence Burkinabè de Normalisation, de la Métrologie et de la Qualité (ABNORM), à travers la Direction du Contrôle de la Qualité et sous la supervision de son Directeur Général, Habraham Somda, a effectué dans la ville de Ouagadougou, divers contrôles d’unités industrielles de production de fer à béton, d’entrepôts et de magasins d’entreposage, ainsi que certains sites de commercialisation, courant décembre 2023 et janvier 2024. Résultat, « d’importantes quantités de fers à béton de qualité douteuse » ont été saisis.
En effet, le 13 janvier 2024, devant l’entrée d’une des unités de production du fer à béton, deux (02) camions contenant du fer à béton, estimé à 100 tonnes chacun, ont été aperçus par l’ABNORM. « Après contrôle, indique M. Somda, il a pu être relevé que lesdits fers à béton, qui appartiendrait à l’unité hôte, ne présentent aucun marquage visible ni quant à leurs caractéristiques ni à leurs origines ». Pourtant, précise-t-il, « les normes sur les fers à béton au Burkina Faso (…) exigent que les fers à béton doivent porter une marque de laminage permettant de reconnaître au moins l’usine productrice, le diamètre et la longueur ». Alors que « les responsables de ladite unité se défendaient que ces fers à béton ont été produits pour être exportés dans un pays voisin, membre de l’UEMOA », Habraham Somda a rappelé que, dans les normes, « les produits industriels originaires font l’objet sur eux-mêmes, lorsque cela est techniquement possible, et sur leurs emballages, d’un marquage permettant leur identification ». Ainsi, « toutes les quantités de fers à béton contenues dans les deux (02) camions ont fait l’objet de saisies », car « ne respectant pas, non seulement la règlementation nationale (…) mais également celle communautaire », du fait qu’ils sont sans marquage.
Deuxièmement, l’équipe de l’ABNORM a constaté, dans un autre camion, « des fers à béton estimés à 40 tonnes estampillés de la marque d’une autre usine, dans l’enceinte de [la même] unité industrielle ». Là encore, a déploré M. Somda, « l’unité industrielle contrôlée ne répond pas aux ‘initiales de la marque’ comme cela apparait sur les fers à béton sous contrôle ». Les responsables de ladite unité ont avancé qu’ils ont reçu un bon de commande de 150 tonnes d’un grossiste revendeur de la place et que ce sont les 110 tonnes dudit bon de commande qui se trouveraient être livrées à l’usine. Cependant, suivant la réglementation en vigueur au Burkina Faso, a expliqué M. Somda, « le marquage sur le fer à béton doit permettre de reconnaître l’usine qui a produit les fers à béton et non celle qui aurait fait une commande ». « Dans le cas-ci, poursuit-il, le marquage est trompeur, puisqu’il indique une usine de production qui n’est pourtant pas celle qui l’a réellement produit ». Ainsi, ces fers à béton ont également été saisis.
Toujours, dans la même unité de production, l’équipe de l’ABNORM a constaté « un stock de fers à béton estimé à 101 tonnes, marqué ‘FE 500’ sur chaque barre de fer ». Sauf que, a relevé le DG, « un contrôle sur la disposition des verrous a fait constater que ces fers portent les verrous de ‘FE 400’ ».
« Des agissements perfides de certains acteurs du secteur de l’acier… »
Face à tout cela, le DG de l’ABNORM a dénoncé ce qu’il a qualifié d’ « agissements perfides de certains acteurs du secteur de l’acier ». Concrètement, « courant décembre 2023, révèle-t-il, certains d’entre eux, attiraient notre attention, et celle des plus hautes autorités sur l’importation et la production frauduleuse du fer à béton au Burkina Faso, notamment l’importation frauduleuse de fer à béton de mauvaise qualité ; la démocratisation du fer non-conforme ; la fraude douanière ; le manque de contrôle de la qualité à l’importation ; l’insuffisance du contrôle de la qualité de fer à béton et le manque de sanctions dissuasives ».
Mais, poursuit-il, « ce qui est surprenant est que ce sont ceux-la mêmes qui dénonçaient sans cesse l’inondation du marché burkinabè par des fers à béton de qualité douteuse qui sont eux-mêmes les principaux auteurs de ces agissements car l’essentiel des saisies sus-relatées ayant été effectuées au sein de leurs unités industrielles ».
Pour l’heure, l’opération déroulée par l’ABNORM entre le 26 décembre 2023 et le 14 janvier 2024 a, selon son DG, permis de « saisir 04 camions de fer à béton de plus de 400 tonnes de qualité douteuse (…) et appartenant à certaines unités de production nationale et à certains grossistes revendeurs de la place ».
« Sous réserve de l’appréciation de l’autorité chargée des poursuites pénales, à qui il sera référé, et sous réserve de ce qu’il appartiendra aux éventuelles victimes de se constituer en parties civiles, les faits sus-relatés peuvent tomber sous le coup d’une tromperie, tentative de tromperie, falsification et atteinte à la sécurité du consommateur », a indiqué M. Somda, précisant que « ces infractions sont passibles (…) d’une amende de 500 000 à 500 000 000 de F CFA et d’un emprisonnement d’01 an à 05 ans ou de l’une de ces 02 peines seulement ».
Présent à la conférence de presse, le Président de la Ligue des Consommateurs du Burkina (LCB), Dasmané Traoré n’a pas manqué de féliciter l’ABNORM pour ces résultats qui ont permis de « mettre hors d’état de nuire une certaine quantité de fer ». Il a, dans ce sens, invité le consommateur à accompagner les agents de contrôle. « Aujourd’hui, lorsqu’on vous dit que c’est un fer de 10, c’est en réalité un fer de 08 et quand on vous dit, c’est un fer de 08, c’est en réalité un fer de 06 », a-t-il dénoncé cette forme de « spoliation du consommateur » par des « commerçants véreux ».
Dans la même dynamique, tout en saluant les Burkinabè pour la veille citoyenne, Habraham Somda les a invités à continuer dans la dénonciation pour permettre aux services techniques de faire des investigations pour combattre le phénomène.
Franck Michaël KOLA
Minute.bf
