En conseil des ministres le 11 octobre 2023, le gouvernement burkinabè a pris la décision de débaptiser le Boulevard Charles De Gaulle en Boulevard Thomas Sankara, ce en plus des édifices qui portent déjà le nom du Héros de la nation. Cette décision intervient à l’orée de la célébration du 36e anniversaire de l’assassinat du Capitaine Thomas Sankara.
Des citoyens ont apporté leur appréciation au micro de Minute.bf
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Pour Lianhoué Imhotep Bayala, membre fondateur du cadre « Deux heures pour nous, deux heures pour Kamita » , par ailleurs acteur de la société civile, cette résolution est un sentiment de satisfaction, de joie et de triomphe face au colonialisme français. « C’est un gros coup de pied dans l’imaginaire colonial, cette souillure qui a été le colonialisme. C’est vraiment une victoire éclatante de voir que le gouvernement a ratifié cela et nous sommes très reconnaissants du leadership du Capitaine Traoré et l’ensemble de son gouvernement qui veulent faire corps avec le rêve panafricain et celui de la décolonisation », s’est-il satisfait. À en croire le Doctorant en Anthropologie culturelle, le fait qu’il y ait de plus en plus d’édifices publics ou privés qui héritent du nom Sankara n’est pas une affaire de trop, mais plutôt une volonté des acteurs qui se reconnaissent en Sankara de lui rendre hommage et justice. Le tout mû par une volonté de réhabilitation.
De ses dires, l’on ne saurait payer le guide de la révolution de 1983 pour ce qu’il a fait pour l’humanité. « Je pense que l’espace public burkinabè a déjà consacré et validé Sankara comme une mémoire positive, fertile. La mémoire de Sankara est une mémoire centrale. Quand on voit l’Université, le Mémorial et des Lycées Thomas Sankara qui sont des initiatives privées, ça rentre dans le cadre d’une réappropriation et d’une justice qu’on veut faire à Sankara, parce qu’on considère dans les consciences populaires africaines et burkinabè que Thomas Sankara a été victime d’une ingratitude et d’injustice », a-t-il indiqué.
Toujours selon Imhotep Bayala, les 12 compagnons de Sankara n’ont pas été du tout oubliés, car il n’y pas une « hiérarchisation de mort » à faire. Chaque mort mérite un respect et c’est pourquoi il invite les uns et les autres à rendre pérenne leur mémoire à l’image du mémorial qui prend en compte tous les 12 compagnons qui ont contribué à implémenter le sankarisme.
Cependant, il formule le vœu aux autorités de parachever ce rebaptême en donnant à la pédiatrie une dimension nationale, car selon lui, c’est par la pédiatrie que l’enfant prend contact avec le monde sanitaire.
Pour Pegrwende Kima, titulaire d’une licence en sociologie, « il faut d’ores-et-déjà attribuer le nom du pays à Sankara, par exemple Burkina Faso la terre de Thomas Sankara ». À l’en croire, débaptiser le boulevard Charles de Gaulle en boulevard Thomas Sankara est un acte fort appréciable au regard de l’immensité de tout ce que l’homme a été. « Je pense qu’au regard de ce que Sankara a incarné comme valeur morale, comme le symbole de toute l’Afrique, de l’unité africaine, de la véracité, c’est-à-dire de l’humilité qui a contaminé tout le monde entier, il mérite mieux que ça », a martelé le sociologue Kima.
De ses dires, cette décision gouvernementale est la preuve que des milliers de Sankara sont vraiment nés. « Nous en sommes très contents, voir le plus grand avenue du pays désormais avenue Thomas Sankara qui a été réfléchi et baptisé de façon informelle par un groupe d’étudiants qu’on appelle Deux heures pour nous deux heures pour Kamita. Je pense que ce sont des milliers de Sankara qui sont nés puisque Sankara l’avait prophétisé lorsqu’il mourrait. Et donc ce sont ces milliers de Sankara qui sont nés et qui pensent qu’il ne doit pas être jeté dans les oubliettes de l’histoire », ajoute-t-il. De façon symbolique et sociologique, pour Pegrwende Kima en baptisant l’avenue 101 boulevard Thomas Sankara, cela veut dire que le feu tricolore n’est plus le feu mais Sankara en personne qu’il faut respecter comme tel.
Quant à Talato Ouédraogo, titulaire d’une licence en Lettres modernes et par ailleurs Guide au mémorial international Thomas Sankara, ce rebaptême est une victoire à mettre à l’actif de la jeunesse et des héritiers du héros national. Mieux, pour le guide Ouédraogo, Sankara mérite tous les honneurs car il a fait le sacrifice suprême.
« Moi je pense que cela n’est pas de trop pour Thomas Sankara au regard de ce qu’il a pu faire pour le Burkina Faso. Au delà de tout type de sacrifice qu’un homme peut faire pour son pays, Sankara a payé de sa vie pour que le Burkina règne aujourd’hui. Quant on regarde, malgré son absence physique ce qu’il représente pour la population burkinabè, sous régionale et même africaine, je pense que c’est tout a fait normal qu’il soit sur tous les lieux pour marquer un peu plus la psychologie parce qu’on demande aujourd’hui de l’enseigner. Pour qu’on puisse être fier d’appartenir à ce Burkina Faso et parler de la révolution il fallait qu’on ait un 83, Thomas Sankara. Donc pour moi, c’est tout à fait normal qu’on ait tous ces édifices là pour le père de la révolution », a-t-elle déclaré.
Pour Ollo Paul Kambou, étudiant inscrit en première année de Master en Littérature et culture africaine, les autres compagnons de Sankara ne sont pas oubliés. Ils sont également pris en compte. De son avis, aucun héros n’a été ignoré car le monument des martyrs est la marque déposée des héros nationnaux.
« Je pense que ce n’est pas une façon de les léser, de les oublier mais je crois que le rond point des martyrs est quelque part le résumé en fait de ces compagnons qui sont tombés avec le Capitaine Thomas Sankara. Mais quoi qu’on dise dans une lutte, dans un mouvement, il y a celui qu’on appelle le leader le porte-flambeau. Le fait qu’on baptise des rues, des universités, des écoles au nom de Thomas Sankara, ce n’est pas le nom de Sankara en tant qu’individu, mais on tient compte de ces compagnons. Quand on parle de Sankara à l’arrière on tient compte de ceux-là qui l’accompagnaient. Et je crois que le rond point des martyrs est le résumé en fait de tous ces compagnons qui sont morts avec lui » a argumenté Monsieur Kambou.
Pour rappel le Boulevard 101 Charles De Gaulle avait été déjà débaptisé le 28 novembre 2017, par un groupe d’étudiants sous la coupole de Serges Lianhoué Imhotep Bayala lors de la venue du Président Français Emmanuel Macron à l’université Joseph Ki-Zerbo.
Jean-François SOME (Stagiaire)
Minute.bf
Ce n’est qu’au Sénégal où l’on débaptise une rue qui nous rappelle un passé douloureux de notre histoire car portant le nom d’une figure qui a beaucoup contribuer à l’oppression des populations sénégalaises en particulier et Africaines en général, pour lui faire porter le nom d’un fils du territoire qui a beaucoup œuvré pour son pays, que des voix s’élèvent pour fustiger cette initiative très louable. Comme pour dire qu’au Sénégal, ils y a toujours des personnes nostalgiques de ces tragédies que sont la traite négrière et son prolongement, la colonisation.