Ceci est une déclaration du Mouvement burkinabè des Droits de l’Homme et des Peuples (MBDHP) sur le drame de Nouna.
Dans la nuit du 29 au 30 décembre 2022, le quartier-général (QG) de la confrérie des dozos de Nouna a subi une attaque terroriste. Selon les informations recueillies par le MBDHP, l’attaque n’a heureusement causé aucune perte en vie humaine mais a engendré des dégâts matériels.
A la suite de cette attaque, des personnes identifiées par des témoins comme étant des volontaires pour la défense de la patrie (VDP) de Nouna, ont mené nuitamment des opérations de représailles dans les secteurs 4 et 6 de la ville, majoritairement habités par des membres de la communauté peulh. Ces représailles ont duré plusieurs heures sans que les FDS et autres autorités locales n’interviennent pour protéger les personnes ciblées, abandonnées à leurs bourreaux. De sources officielles, ces opérations ont coûté la vie à vingt-huit (28) personnes, pour la plupart tuées par balles.
Le MBDHP condamne fermement l’attaque subie par le QG de la confrérie des Dozos, ainsi que les tueries ciblées qui s’en sont suivies. Il présente ses condoléances les plus attristées aux familles des victimes et souhaite un prompt rétablissement à tous les blessés de ces graves évènements.
Une fois de plus, notre pays et son peuple sont endeuillés par des actes effroyables, dignes de films d’horreur et qui traduisent l’inhumanité de leurs commanditaires et auteurs.
Les premiers éléments recueillis suite aux tueries de Nouna indiquent que les suppliciés ont été froidement abattus chez eux parce que soupçonnés, sans éléments de preuve tangibles, d’être de mèche avec des groupes armés terroristes.
Ces tueries rappellent celles de Yirgou, Arbinda, Kain-Ouro, Barga, Nagaré, Natiembouri, Foutouri, Kelbo, Kantari, Nadiaboanli, Dablo, Gondékoubé, Zimtenga, Salmossi, Ouragou-Boungou, Hallalé, Nagraogo, Alamou, Koumbia, Ouahigouya, Loropéni et de bien d’autres localités et qui n’ont hélas connues aucune poursuite véritable.
En réalité, ces tueries aveugles et autres exécutions sommaires et extrajudiciaires ont contribué à plonger notre pays dans un cycle infernal de violences. Au fil des années, ces violences ont pris un caractère ethnique et ont davantage fragilisé le tissu social, plongeant le Burkina dans les affres d’une guerre civile dont les ravages sont perceptibles dans nombre de localités du pays.
Le MBDHP et bien d’autres organisations de droits humains n’ont eu de cesse d’interpeller les régimes politiques successifs de notre pays (MPP, MPSR-1, MPSR-2) sur le caractère contreproductif, inutile et dangereux des exécutions sommaires et extrajudiciaires ainsi que des disparitions forcées et autres arrestations et détentions arbitraires.
Malgré les incessants appels à la mesure, au bon sens et au discernement dans la lutte contre le terrorisme, les abus évoqués plus haut ont connu une hausse inquiétante depuis le mois d’octobre 2022. Plusieurs dizaines de cas d’enlèvements suivis d’exécutions ou de disparitions forcées ont été signalés au MBDHP et notifiés aux autorités politiques et judiciaires. Au cours de ces dernières années, plus d’une centaine de saisines et de plaintes de victimes et de leurs ayant-droits ont été déposées au pôle judiciaire spécialisé dans la répression des actes de terrorisme, au tribunal militaire de Ouagadougou et devant bon nombre de tribunaux de grande instance comme ceux de Banfora, Boromo, Dédougou, Gaoua, Ouahigouya, Fada-N’Gourma, Tenkodogo, Dori et bien d’autres.
Pour l’essentiel, les nombreuses plaintes et actions judiciaires introduites ne semblent pas avoir beaucoup évolué, renforçant ainsi le sentiment d’une garantie d’impunité tacite offerte aux commanditaires et exécutants de ces exactions et tueries.
Face à cette situation, le MBDHP interpelle les autorités sur leur obligation d’assurer la sécurité de tous les citoyens sans discriminations notamment basées sur l’origine ethnique ou l’appartenance à une confession religieuse.
Le Mouvement les appelle, une fois de plus, à agir pour mettre un terme aux exécutions sommaires et extrajudiciaires ainsi qu’aux disparitions forcées qui ont largement contribué à dégrader la situation sécuritaire dans notre pays.
Le Mouvement appelle également les autorités judiciaires à assumer pleinement leurs responsabilités pour la sauvegarde des libertés individuelles et collectives au Burkina Faso. Il les invite à agir avec courage pour donner une suite appropriée aux plaintes pour violations et atteintes aux droits humains signalées dans leurs ressorts respectifs.
Enfin, le MBDHP appelle ses militants et militantes à s’organiser aux côtés des autres couches sociales de notre pays afin de revendiquer le droit à la sécurité pour tous les Burkinabè, des villes comme des campagnes et pour dénoncer les exécutions sommaires, extrajudiciaires et les disparitions forcées qui constituent des facteurs d’aggravation de la situation sécuritaire dans notre pays. Notre Mouvement demeure convaincu que seule l’unité populaire autour du droit à la sécurité pourrait contribuer à venir à bout des forces du mal qui endeuillent quasi-quotidiennement nos populations des villes et campagnes.
Non au terrorisme !
Non aux exécutions sommaires, extrajudiciaires et aux disparitions forcées !
Ensemble, renforçons l’unité populaire contre le terrorisme !
Fait à Ouagadougou le 04 janvier 2023
Le Comité exécutif national