Les élections couplées législatives et présidentielle au Burkina Faso ont eu lieu le 22 novembre 2020. Ces scrutin a été « entachés d’irrégularités », reconnaissent les différents partis de l’opposition comme de la majorité. Le Réseau Ouest-africain pour l’Edification de la Paix (WANEP) et le Centre Coordonné d’Observation de la Sécurité électorale des femmes (COSEF), dans leur rapport d’observation de ces élections, ont également reconnu la présence de plusieurs incidents et irrégularités qui ont émaillés le scrutin.
Tout au long du scrutin du 22 novembre 2020, ce sont 400 observateurs et observatrices qui ont été déployés par le COSEF, en collaboration avec le projet Elections Violence Mitigation Analyses Monitoring (EMAM), pour l’observation des élections. Ces observateurs ont collecté des données sur la sécurité électorale en générale et sur celle des femmes en particulier. Ces données ont été traitées, analysées et exploitées, assure Anne Konaté, Présidente de la Chambre de décision du COSEF, qui était face à la presse le mardi 24 novembre 2020 à Ouagadougou.
Ainsi, au cours du scrutin, 9 incidents, dysfonctionnements et insuffisances ont été constatés par les observateurs du COSEF. Il s’agit, premièrement, de la non disponibilité des listes électorales. Les observateurs ont aussi constaté l’absence de bureaux de vote, de membres de bureaux de vote et de matériel électoral dans certains centres. Aussi, y a-t-il eu 5 cas où des électeurs munis de cartes et non-inscrits ont entrainé des violences verbales. Egalement, des altercations ont éclaté entre membres de bureaux de vote et représentants de partis politiques venus donner des consignes de vote à des électeurs, à en croire Anne Konaté.
Comme incident constaté au cours de ce scrutin, c’est l’utilisation de téléphones portables dans l’isoloir sous prétexte du faible éclairage dans les isoloirs. Ces incidents ont été constatés dans l’arrondissement 11, secteur 46, bureau de vote n°12 de la ville de Ouagadougou, province du Kadiogo, Région du centre. En plus, il y avait l’absence de fiches de dépouillements au bureau de vote n°12, centre du Lycée Bangré Yiguia, et l’école SAMORA Machel, secteur 29, arrondissement n°6, province du Kadiogo, Région du centre. Sur ce point, du fait de ces irrégularités, certains électeurs dont des femmes, après quelques moments d’attente sans issues et démotivés, sont repartis sans pouvoir voter.
Autre incident signalé, c’est l’ouverture d’une urne scellée, par la secrétaire de bureau de vote, sans attendre que l’ensemble des membres dudit bureau constate l’effectivité du scellé, conformément aux dispositions du code électoral. Cela aurait occasionné, selon la principale conférencière, un différend entre celle-ci et le président du centre SNIF, secteur n°1 de la ville de Koudougou, Province du Boulkiemdé, Région du Centre-Ouest.
En attente de procès-verbaux paraphés, faut-il ajouter comme irrégularité, les résultats ont été reportés sur de simples feuilles au centre de vote Ecole maternelle du secteur n°10, bureau de vote n°3, ville de Ouahigouya, province du Yatenga, région du centre-nord. Il y a aussi eu le non exercice du droit de vote d’une électrice, au motif qu’un électeur ait déjà signé à sa place dans le Centre de vote Ecole Amaya bureau de vote n°1, ville de Ouagadougou, province du Kadiogo, Région du Centre ; l’impossibilité de vote de quatre électrices, déplacées internes, dans la zone d’accueil de la ville de Houndé, Province du Tuy, Région des Hauts-Bassins du fait du non transfert de leurs noms sur les listes électorales de leur province d’origine à la province du Tuy.
Recommandations pour la prévention et l’atténuation des violences post-électorales
Les conférenciers ont fait plusieurs recommandations en vue de la prévention et de l’atténuation des violences post-électorales et, surtout, pour une meilleure prise en compte de la dimension genre dans les prochains scrutins.
Ainsi, à l’endroit du gouvernement, le COSEF recommande le renforcement des capacités des FDS pour une sécurisation efficace du territoire, en vue de garantir des processus électoraux inclusifs et sécurisés ; le renforcement de la participation des femmes dans des conditions égales avec les hommes, dans les actions de prévention, de règlements de conflits et à l’édification de la paix, en lien avec les instruments juridiques internationaux ratifiés et nationaux ; le renforcement la représentativité de la femme dans les instances de décision ; la relecture de la loi sur le positionnement des femmes pour entre autres l’assortir de sanctions coercitives ; sensibiliser la population pour le changement des mentalités en faveur de la participation des femmes en politique, etc.
Aux partis et formations politiques, le COSEF les appelle à mettre en œuvre un programme de formation et de renforcement de capacités au profit de leurs militants sur les procédures de vote ; renforcer les capacités des femmes membres de décision des partis politiques ; utiliser les voies de recours légales pour les contestations conformément au code de bonne conduite signé, etc.
A la CENI, le COSEF appelle à adopter une politique genre au sein de l’institution et de ses démembrements, pour assurer une meilleure participation des femmes dans les processus électoraux ; mettre à disposition à temps, tout le matériel nécessaire au scrutin et s’assurer du bon déroulement de toutes les étapes du processus ; renforcer l’éducation des femmes sur le processus électoral ; déployer plus de femmes comme personnel électoral à des postes de responsabilité, etc.
Aux organisations des femmes et de la société civile, il s’agira de promouvoir une meilleure participation des femmes aux processus électoraux par la communication de proximité et la sensibilisation, de mener un plaidoyer pour la réalisation d’un audit genre de la CENI, de promouvoir le dialogue inter générationnel pour assurer la pérennité des actions menées en matière de promotion de la femme en politique, de mener des actions de plaidoyer en vue d’élections apaisées et de l’acceptation des résultats officiels.
Tout compte fait, le COSEF, conformément à sa mission de contribuer à des élections apaisées et inclusives lance un appel au calme à l’ensemble des acteurs et à la population.
Armand Kinda
Minute.bf