Le 2 avril dernier dans son adresse à la nation, le président du Faso avait pris toute une batterie de mesures pour soutenir les populations durement frappées par cette crise sanitaire qui impacte leurs vie et activités. Au titre des mesures sociales d’accompagnement, pour les mois d’avril à juin 2020, le président du Faso avait annoncé dans son discours, la prise en charge des factures d’eau de la tranche sociale, et la gratuité de la consommation au niveau des bornes fontaines… Ces mesures sont-elles effectives dans les bornes fontaines ? Quelles sont les appréciations des populations ? Pour trouver des réponses à ces interrogations, une équipe de Minute.bf s’est rendue dans la zone non lotie de Watinooma, dans l’arrondissement 9 de Ouagadougou.
Il est 10h30 le mardi 14 avril 2020. Les chauds rayons du soleil dardaient les habitations de la zone non lotie de Watinooma, située à quelques 3 kilomètres de la route nationale 22, dans l’arrondissement 9 de Ouagadougou. Chacun s’afférait à ses charges quotidiennes. Quelques boutiques ont ouvert leurs portes pour permettre aux populations de se ravitailler en articles divers. Certaines femmes, des vendeuses de légumes, elles avaient pris d’assaut les abords de la voie rouge qui conduit dans le tréfonds de la zone non lotie. Oignons, tomates, choux, concombres, bref. Les légumes étaient disposés sur des étals qui s’étouffaient dans la poussière que soulevait la circulation des engins. Les vendeuses apostrophaient chaque passant pour attirer son attention sur leurs produits.
Le coronavirus ne préoccupe plus autant…
A environ un kilomètre de là se trouve une fontaine. Elle est située au cœur de cette zone non lotie concentrée de monde. Sur les lieux où nous sommes arrivés à 11 h 03 minutes, ce sont des barriques et des bidons à perte de vue qui nous accueillent. Des enfants jouaient sous un hangar de circonstance, à peine si cela pouvait leur protéger des rayons perçants du soleil. Les femmes devisaient sous un autre hangar. Là-bas, le coronavirus, cette vile maladie devenue star à cause de sa létalité sans conteste dans le monde entier, n’était pourtant pas sur les lèvres. Pourtant, plus de cent mille vies ont été arrachées par ce virus qui a pris le monde en otage. Au Burkina Faso, à la date du 13 avril, le compteur marquait 30 décès. Plus de 500 personnes ont été contaminées par cette maladie au Pays des Hommes intègres. Mais, le coronavirus est loin d’être le premier souci de ces femmes qui ne jurent que sur leurs barriques d’eau pour subvenir à leur différents besoins.
La distanciation, le lavage des mains, le port de masques, bref, pour ce qui est des mesures barrières contre le covid-19, rien n’est respecté chez ces femmes. Le regard figé sur la fontaine, elles attendent impatiemment le retour de l’or bleu qui les avait abandonnés en pleine matinée. Depuis 6h, nous confient-elles. Alors qu’il faut attendre dans l’après-midi, entre 13h et 14h pour voir une goutte du précieux liquide bleu sortir du bout du robinet. Qu’est ce qui peut bien expliquer ces coupures intempestives d’eau dans ces bornes fontaines ?
Des femmes vendent de l’eau pour subvenir à leurs besoins familiaux
« Depuis que le président a annoncé la gratuité, nous ne pouvons plus avoir assez d’eau dans les fontaines. La nuit avec le couvre-feu, il nous est impossible d’avoir de l’eau. Pourtant, quand il n’y avait pas la gratuité, l’eau ne se coupait pas de la sorte. Ceux qui n’avaient même pas les 50F souvent pour venir puiser l’eau viennent disposer des récipients à perte de vue devant la fontaine à la recherche de l’eau », nous confie Salmata Ilboudo, une revendeuse d’eau, qui estime pour sa part, qu’il était mieux de ne même pas rendre l’eau gratuite si l’on n’avait pas les moyens de garantir sa permanente disponibilité.
Elle est appuyée par Salmata Kaboré, une autre revendeuse d’eau. « Si l’on trouve que la gratuité va impacter la disponibilité de l’eau, qu’on nous permette de toujours payer et que l’on utilise la subvention qu’on devrait accorder aux bornes fontaines pour subventionner les denrées alimentaires afin que nous puissions y avoir accès facilement pour nourrir nos enfants », propose-t-elle.
Ces femmes demandent aussi l’allègement de l’heure du couvre-feu. Dans cette vidéo ci-dessous, elles reviennent sur les difficultés qu’elles rencontrent avec cette corvée d’eau et souhaitent que des actions puissent être faites pour soulager leur souffrance car, confient-elles: « c’est l’eau que nous revendons pour scolariser nos enfants et subvenir à nos besoins familiaux ».
Vidéo-Covid-19: La gratuité dans les bornes fontaines alterne avec le manque d’eau
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