Ceci est une déclaration du Syndicat Autonome des Agents du Ministère des Affaires Étrangères et de l’Intégration Africaine (SAMAE) en réponse à leur ministre de tutelle, Alpha Barry sur l’interdiction mercredi, dans une publication sur sa page facebook, du sit-in que prévoyaient les syndicats pour protester contre la « mauvaise gestion » du département des affaires étrangères et de la coopération. Lisez plutôt !
« Par publication sur les réseaux sociaux en l’occurrence Facebook à 17h 06 minutes, le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération s’est permis d’interdire le sit-in projeté par le Syndicat Autonome des Agents du Ministère des Affaires Etrangères et de l’Intégration Africaine (SAMAE), tirant motif de l’argument fallacieux « de la menace de la maladie à coronavirus (COVID 19) » et de l’avis n°05- /2017-2018 du Conseil d’Etat sur le sit-in.
Cette décision malencontreuse prouve une fois de plus l’incurie des autorités en charge des Affaires Etrangères dont l’opportunisme et la précipitation sont érigés en mode de gouvernance.
Du mépris des règles minimales de l’administration publique
Le canal par lequel, Son Excellence Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères et son Cabinet ont entendu informer le personnel dénote clairement de l’amateurisme et la légèreté avec lesquels les actes administratifs sont perçus au sein du département.
Une publication sur une page Facebook relève-t-elle désormais des actes administratifs d’information en droit burkinabè ? Il est à regretter cette banalisation de l’action administrative avec la bénédiction de l’Ambassadeur Seydou SINKA, Secrétaire Général du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération censé être le garant du respect des procédures, normes et pratiques administratives.
Si le Ministère des Affaires Etrangères remplit une mission de service public à l’instar des autres départements ministériels, son positionnement stratégique dans la défense des intérêts du Burkina Faso impose à ses premiers responsables un sens élevé des procédures administratives qui doivent garder leur formalisme légendaire.
Il est dès lors indigne et imprudent pour le Ministre et son cabinet de fouler au pied les valeurs cardinales qui gouvernent l’administration et vouloir paradoxalement attendre des administrés une attitude contraire.
C’est donc le lieu pour le SAMAE d’appeler au sens de la responsabilité de certains Conseillers Techniques, Ambassadeurs, inspecteurs des services, Directeurs Généraux, Directeurs et chefs de service avec le concours desquels le Ministre et son Cabinet entendent poser des actions illégales et irrégulières qui ne sont pas de nature à honorer la diplomatie burkinabè. Aussi, que ces responsables se ressaisissent et se départissent des pratiques malsaines et illégales d’intimidation et de menace de leurs collaborateurs, engagés à exprimer leurs droits syndicaux. Autant le SAMAE n’intimide pas les agents, autant il exige de l’administration le respect des libertés syndicales, faute de quoi, elle sera tenue pour responsable de toute conséquence fâcheuse qui en découlerait.
A ces courtisans éhontés nous tenons à rappeler que la loyauté ne saurait se confondre au larbinisme ; la loyauté s’exerce dans une perspective de service public et non d’une loyauté aveugle et partisane qui ne saurait convenir à la neutralité de l’administration, ni à l’efficacité de son rendement.
Par ailleurs, ils trahissent le sens de l’honneur, du courage et de l’objectivité qui caractérisent tout diplomate digne.
De l’abus de pouvoir comme mode de gouvernance
Les autorités du ministère des Affaires Etrangères s’illustrent au quotidien par un usage excessif du pouvoir que leur confère leur statut au point de confondre les affaires personnelles à la conduite des affaires publiques.
Comment peut-on raisonnablement comprendre que le Secrétaire Général se méprenne au point d’exiger de son personnel des explications sur des faits intervenus hors du cadre professionnel ? Cela témoigne à souhait la maladresse avec laquelle l’administration des Affaires Etrangères est conduite.
Aussi, nous voudrions en appeler à une plus grande responsabilité des dirigeants du Ministère dans l’usage de leur pouvoir discrétionnaire qui ne saurait se confondre à l’autoritarisme.
Le Ministre en interdisant le sit-in au motif d’une délibération du Conseil des Ministres sur la maladie à corona virus, fait œuvre d’interprétation en donnant un contenu à la notion de manifestation et de rassemblement qui, du reste, ne fait pas encore l’objet d’une mesure règlementaire.
Il usurpe non seulement un rôle qui n’est pas le sien, mais fait une mauvaise interprétation au regard du règlement sanitaire de l’OMS. Cette promptitude du Gouvernement et du Ministre des Affaires Etrangères en particulier à interdire implicitement toute manifestation syndicale témoigne une fois de plus, si besoin en est de le rappeler, leur déphasage avec les règles et les bonnes pratiques nationales et internationales en matière de libertés syndicales.
De l’atteinte aux libertés d’association et de réunion
L’expert indépendant sur la liberté de réunion et d’association avait, dans son rapport présenté devant le conseil des droits de l’Homme en 2019, déploré le rétrécissement continue de l’espace civique par les pouvoirs publics.
Ainsi, le chef de la diplomatie en liant la notion « sans contenu » de manifestation à l’observation d’un sit-in par des agents mécontents de sa gestion aventuriste traduit sa volonté de musèlement des opinions contraires. La présence des agents de police de la Compagnie Républicaine et de Sécurité (CRS) dans les locaux du Ministère finit de convaincre non seulement de la volonté de passage en force qui caractérise les autorités en charge du département mais aussi du caractère perfide de la prétendue disponibilité au dialogue.
De ce qui précède, le SAMAE est résolu à travailler à la restauration de l’image de la diplomatie burkinabè qui, en quelques années de gestion, a perdu de son lustre d’antan et de ses lettres de noblesses.
Ainsi, jusqu’à la mise en place d’un cadre sincère de dialogue pour la satisfaction des revendications, appelons l’ensemble des agents à la centrale et dans les Missions Diplomatiques et Postes Consulaires à :
• surseoir au traitement des actes de ratifications ;
• ralentir la délivrance des notes verbales pour les missions et voyages officiels ;
• ralentir progressivement la délivrance des visas ;
• réduire au stricte minimum la couverture des réunions et manifestations au sein des organisations internationales de leur juridiction ;
• arrêter de travailler en dehors des heures de service et de se tuer à la tâche.
Interpellons tout responsable qui se prêterait à assurer les taches de ses agents qu’il se rend responsable de tout le service.
Au péril de notre vie, nous ne saurons cautionner devant l’histoire la liquidation programmée du corps de la diplomatie.
Voudrons enfin, mettre à la charge des plus hautes autorités qui, par leur silence coupable, cautionnent et encouragent le clientélisme, le clanisme et le sabordage de la diplomatie burkinabè.
Vous en serez tenus pour responsables devant la nation et devant l’histoire.
Ni partisan, ni courtisan, la cause est commune !
Le Bureau National