« Kongoussi » qui signifie littéralement « On ne peut pas dormir ». Ceux qui connaissent l’histoire de ce nom parleront de la réputation des moustiques de cette ville. Par contre, ceux qui y ont séjourné en décembre parleront plutôt de son froid qui fouette les populations à la periode de la fraicheur. Même les résidents permanents souffrent sérieusement à cette période de l’année. Quel sera le sort d’une personne déplacée qui y séjourne pour la première fois?
Tôt dans la matinée du vendredi 27 décembre 2019, une équipe de minute.bf a visité le deuxième site des déplacés internes du secteur N°2 communément appelé « ESCO/Bam ». Pourquoi ce nom? Dans le passé, le stockage et l’emballage du haricot se faisait dans ce gigantesque bâtiment où logent actuellement plusieurs familles venues d’horizons divers pour sauver leur vie face à des meurtriers qui n’épargnent aucune vie sur leur passage.
Comme pour manger au village, ils sont nombreux les enfants à entourer des foyers de feu vifs érigés de façon circonstancielle dans la cour de l’ESCO/Bam. Derrière le bâtiment, à plusieurs dizaines de mètres, sont arrêtés d’un côté les hommes et de l’autre les femmes, tous dans le but de prendre un bain de soleil pour se réchauffer un peu le coeur frigorifié pendant toute la nuit.
« Mon fils, je suis arrivée à Kongoussi bien portant mais je risque de ne pas m’en sortir à cause du froid », nous a laissé entendre une vieille femme dont la blancheur de ses cheveux témoigne de son âge très avancé. Cette octogénaire n’arrive à marche qu’avec l’aide de sa canne qui lui sert de support. Puis, vient une critique exacerbée de la fraîcheur de Kongoussi par les locataires du bâtiment. Un froid glacial qui fait grelotter même ceux qui ont encerclé le feu pour se réchauffer.
Dans les autres sites où sont bâtis des abris de fortune, l’equipe de minute.bf a constaté que la fraîcheur de Kongoussi fait couler beaucoup de salive. « Je ne veux pas que la nuit tombe à cause du froid. Les tentes se refroidissent trop la nuit. Personnellement, je craignais la période de chaleur dans ces abris mais le froid veux nous tuer avant la chaleur », a réagi Asseta Ouédraogo, une femme déplacée logée au site du secteur 1, qui nous confie ensuite qu’elle revenait du dispensaire avec son fils de 5 ans qui, à cause de la fraicheur, a un rhume un peu chronique. « Maintenant, c’est la navette entre le dispensaire et le site avec les enfants », scandent d’autres femmes qui évoquent l’insuffisance de moyens de protection.
En effet, si pour certains, par le biais des bonnes volontés ils ont bénéficié des couvertures qu’ils jugent insuffisantes, pour d’autres c’est une information de distribution de couvertures qu’ils ont plutôt reçue.
Kongoussi, chef-lieu de la province du Bam, commune située à une centaine de kilomètres de la capitale burkinabè accueille depuis quelques mois, plus de trente et cinq mille personnes déplacées suite à l’insécurité grandissante dans les différentes localités environnantes de la ville. Ces personnes sont accueillies dans plusieurs sites pour déplacés. Au Burkina Faso, ce sont plus de 560 000 déplacés qui ont été recensés par le ministère en charge de la femme, de la solidarité nationale, de la famille et de l’action humanitaire depuis l’avènement du terrorisme.
Au cours d’une conférence de presse du gouvernement il y a de cela quelques mois, la ministre Marie Laurence Ilboudo/Marshall avait alerté que si rien n’est fait de façon urgente contre la montée en puissance de l’insécurité, le Burkina Faso connaitra plus de 600 000 déplacés internes d’ici à fin décembre 2019.
Jacques SAWADOGO (correspondant)
Minute.bf