Invité au Global Security Forum de Doha, au Qatar, l’ancien ministre en charge des affaires étrangères du Burkina Faso et médiateur de l’Organisation des nations unies et de l’Union africaine, le général Djibril Bassolé, s’est prononcé sur la crise sécuritaire dans le Sahel. Pour lui, la solution au terrorisme n’est pas que militaire. Dans une interview accordée à Financial Afrik, il a suggéré le dialogue avec les groupes armés terroristes.
Faut-il négocier avec les groupes armés terroristes ? La réponse à cette question n’a jamais fait l’unanimité dans les pays sahéliens confrontés au phénomène. Au Burkina Faso, alors que le président Kaboré lui avait totalement exclu le dialogue dans sa solution à la crise sécuritaire liée au terrorisme, son tombeur, le Lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba lui avait initié « un dialogue » avec ceux qui ont pris les armes contre la Patrie. Le président Traoré lui demande à ceux qui se sont enrôlés de choisir entre déposer les armes ou faire face à la colère des forces combattantes. Dans ce contexte, la question c’est que faire finalement ?
Pour le Général de gendarmerie, Djibril Bassolé, il faut envisager le dialogue. Pour ce faire, il retrace qu’initialement, l’on avait en face « un djihadisme à caractère idéologique et transfrontalier » avec des agresseurs qui « venaient de l’extérieur et décidaient souvent de mourir en kamikaze ». « Aucun dialogue n’était envisageable avec de tels assaillants », lâche-t-il.
Mais, se ravise-t-il, « de nos jours, le djihadisme prend les formes d’insurrections armées locales ou régionales. Des jeunes nationaux des pays visés se sont massivement enrôlés dans les groupes djihadistes, dans des alliances stratégiques et idéologiques pour mener des luttes armées contre leurs Etats. Ils s’attaquent aux forces de défense et de sécurité (symboles de l’autorité de l’Etat) et à leurs concitoyens avec une violence inouïe ».
Dans ce sens, compte tenu de « la complexité du phénomène », il est convaincu que » la solution militaire seule n’arrivera pas à l’éradiquer ». « Pour maximiser les chances de restaurer une paix durable, les Etats doivent promouvoir des canaux de dialogue parallèlement à des dispositifs militaires robustes et bien adaptés à la nature de la menace terroriste », soutient Djibril Bassolé qui précise que « dialogue ne veut pas dire capitulation ». « Un dialogue constructif, appuie-t-il, a besoin d’un Etat fort et crédible ».
« Etablir un dialogue, donc un contact avec les insurgés locaux, est indispensable car ce sont des nationaux qui suivent les mouvements djihadistes parce qu’ils n’ont pas d’autres alternatives. Un dialogue permet d’abord de mieux évaluer la situation de l’insécurité, d’en faire un diagnostic précis et de cerner les causes profondes de l’adhésion massive des jeunes nationaux aux actions terroristes », a insisté l’ancien ministre en charge des affaires étrangères qui rappelle que « le dialogue fait partie des moyens typiquement africains de régler les conflits et d’apaiser les tensions ». « Je pense qu’ en tant qu’africains nous devons trouver des voies propres à nous pour résoudre les crises qui minent nos sociétés », se convainc-t-il, relevant que « le djihadisme prend par endroit la forme d’une insurrection armée qui pourrait conduire à une guerre civile ».
Interrogé sur son état de santé, le général a répondu à Financial Afrik : « Je rends grâce à Dieu de cette évolution tout à fait satisfaisante de mon état de santé selon les médecins traitants. J’ai subi une grosse chirurgie mutilante qui m’a sauvé la vie. Le suivi et les contrôles périodiques se poursuivent bien par le centre spécialisé de l’hôpital Saint Louis de Paris qui m’a bien pris en charge ».
En ce qui concerne ses démêlés judiciaires, l’ancien ministre a réagi : « je souhaite seulement que, ce qui n’est en réalité qu’une cabale (tous ceux qui connaissent du dossier en conviennent) et les tracasseries judiciaires y effarantes, connaissent un dénouement heureux avec une justice véritablement indépendante dans la plus grande transparence ».
Pour information, condamné dans le cadre du coup d’Etat de septembre 2014, le Général Djibril Bassolé a bénéficié d’une liberté provisoire pour se soigner en France et depuis lors il n’est plus revenu malgré son état de santé visiblement amélioré.
Minute.bf