« Engager les jeunes dans la prévention et la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent au Burkina Faso à travers l’Education aux Médias et à l’Information (EMI) », c’est le thème du projet piloté par EducommunicAfrik depuis novembre 2020. Les responsables de cette organisation de jeunes ont présenté le bilan à mi-parcours dudit projet, entamé en novembre 2020 et prévu prendre fin en novembre 2022, dont le taux de réalisation est déjà estimé à 70% avec plus de 300 jeunes touchés. Ce projet est financé par l’ambassade des Pays-Bas au Burkina Faso.
L’objectif global de ce projet est de « contribuer à renforcer la résilience des communautés pour rejeter, prévenir et contrer la radicalisation, afin de parvenir à la paix et à la cohésion sociale dans les régions du Sahel, du Nord, de l’Est et du Centre-Nord du Burkina Faso », ont fait savoir les responsables de EducommunikAfrik.
Dans la région du Nord, précisément à Ouahigouya, une équipe appelée « volontaire » a été mise sur pied pour réaliser des activités entrant dans le cadre de la sensibilisation, de la prévention et de la motivation contre la radicalisation. À en croire Zainabou Mandé, volontaire de la Région du Nord, leur projet intitulé : « vivons ensemble » a visé la cohésion sociale des jeunes de la région du Nord. Pour ce faire, « on a initié des formations sur la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent au Nord, dont plus de 50 participants ont pris part ; organisé des compétitions d’art oratoire sur les dialogues entre les jeunes dont 7 établissements sur 15 prévus ont pris part ; des thé-débats et bien d’autres activités ont été organisées à Ouahigouya », a détaillé Mme Mandé.
La « Radio voix du paysan » de Ouahigouya s’est également impliquée dans cette lutte à travers une collaboration avec EducommunicAfrik, ce qui a permis de réaliser des émissions entrant dans la prévention et la sensibilisation contre la radicalisation et l’extrémisme violent.
Il y a également eu une table ronde avec les leaders religieux et coutumiers qui ont été appelés à joindre leur voix à la lutte et à lancer un appel pour la cohésion sociale. A cela s’ajoute des émissions interactives. « Nous avons l’intime conviction qu’on n’a pas prêché dans le désert. Le message est passé. Il y a des communes où on a entendu qu’il y avait des conflits. Mais nos émissions de sensibilisation ont contribué à apaiser la situation », a déclaré Moussa Ouédraogo, chef de programme de la Radio voix du paysan.
Le chômage, le problème qui pousse les jeunes à se radicaliser…
Selon les volontaires de la région du Nord, des difficultés ont émaillé la pleine réalisation du projet. Il s’agit principalement du problème de mobilisation des jeunes, la réticence de certaines personnes due à la sensibilité de la thématique. « Lors d’un thé-débat, un jeune m’a confié que si quelqu’un venait à lui proposer 03 millions de FCFA pour adhérer à un groupe extrémiste, il ne voit pas comment il pourrait refuser car n’ayant pas de travail », a révélé la volontaire Zainabou Mandé. Dans ce genre de cas, poursuit-elle, « nous procédons par explication concrète des inconvénients d’une telle adhésion sur la société et sur la vie de l’intéressé en question ». « Nous initions des conférences avec des leaders politiques, religieux et coutumiers qui en long et en large expliquent aux jeunes les tenants et les aboutissants de la radicalisation. Ce jeune a suivi une conférence comme cela et m’a confirmé qu’il a fait un pas en arrière sur ses idées d’adhésion au groupe extrémiste. Il a avoué que si quelqu’un l’abordait pour une pareille idée, il va le refouler », a-t-elle confié.
Les bénéficiaires du projet louent l’initiative…
Raymond Bê Kam, coordinateur de l’association feu rouge, feu vert et bénéficiaire d’une formation de EducommunikAfrik à Ouahigouya a montré sa satisfaction dans la lutte menée contre la radicalisation et l’extrémisme violent. À l’en croire, cette initiative va contribuer à asseoir « sa conviction que le chemin de la sensibilisation est la meilleure pour avoir des résultats dans ce fléau ». Effectivement, « avec cette formation, j’ai compris qu’il y a des mécanismes endogènes de gestion des conflits, la mise en place des comités de monitoring de veille communautaire pour prévenir d’éventuelles crises, les veilles citoyennes. La formation nous a amenés à comprendre comment on doit s’impliquer davantage dans le processus de paix au Burkina Faso, comment nous pouvons entre nous dans l’entourage essayer de sensibiliser nos frères et sœurs à ne pas se radicaliser », a expliqué M. Kam.
Selon Boris Anicet Zonou, chargé de communication de EducommunikAfrik, « l’impact du projet sur les jeunes est visible », étant donné qu’il y a de plus en plus une prise de conscience des jeunes. Il en veut pour preuve les nombreuses réactions et les demandes d’adhésion des jeunes au projet que reçoit EducommunikAfrik. « À 70% de réalisation et vu la mobilisation des jeunes, on peut être satisfait même si ce n’est pas une satisfaction totale », s’est-il réjoui, même s’il reconnaît que « beaucoup reste encore à faire car le changement de comportement est un long processus qui demande beaucoup de ressources et d’engagements ». Aussi, ajoute-t-il : « on a compris qu’on peut ne pas être militaire et s’investir dans le combat dans un travail extraordinaire de sensibilisation ».
Le coût global du projet est estimé à plus de 320 millions de FCFA sur les 2 ans. Les régions du Sahel, de l’Est et du Centre-Nord ont été touchées par le projet.
Mathias Kam
Minute.bf