Me Ferdinand N’Zepa, avocat de la partie civile, dans ses plaidoiries au procès du dossier Thomas Sankara et 12 de ses compagnons ce jeudi 3 février 2022 a nommément félicité et salué le courage de l’accusé Yamba Elysée Ilboudo. Selon lui, c’est grâce à Yamba Elysée Ilboudo que l’on tire l’essentiel du déroulé de l’assaut survenu le 15 octobre 1987 contre Thomas Sankara et ses 12 compagnons au Conseil de l’Entente. Me N’Zepa est allé jusqu’à demander au tribunal de tenir compte du « bon comportement » de ce dernier. Nous vous proposons toute sa réaction sur ce point.
« Sans Yamba Elysée Ilboudo, on n’aurait jamais connu ce procès. Sans Élysée, on serait resté à la version de ceux qui étaient au Conseil de l’entente. Et on n’aurait même pas envisagé que les auteurs du coup, le commando, étaient partis de chez Blaise Compaoré. C’est parce que Élysée a parlé qu’on connait l’itinéraire du commando jusqu’au Conseil.
C’est la raison pour laquelle j’ai tenu à le préciser et quand on voit le personnage, on se rend compte que c’est un monsieur simple. Je pense qu’il a eu beaucoup de remords depuis 1987 raison pour laquelle il a dû dire devant le juge d’instruction ce qu’il a dit. C’est un poids qu’il portait depuis des années et il fallait qu’il se soulage. Quand on fait cet effort devant le tribunal, je pense qu’il faut en tenir compte. Nous sommes dans une procédure où tout le monde est de mauvaise foi. C’est le jeu des menteurs, on a ceux qui n’assument pas leur responsabilité comme Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando. On a ceux qui sont présents, qui ne se souviennent de rien; on en a d’autres qui sont sur le mutisme ou des non, non, non… jusqu’au bout. Or Yamba Elysée Ilboudo, il a assumé devant le juge d’instruction. Lors de son audition ici, il a confirmé exactement ce qu’il avait dit. Vous avez constaté même que le jour où il est passé il avait un malaise quand on lui demandait s’il a vu Gilbert Diendéré, il avait très peur, alors que devant le juge d’instruction il affirme avoir vu le Général Diendéré debout avec ses hommes. Le jour de l’audience, il avait peur de dire cela parce qu’il avait une certaine pression et je pense que lorsque quelqu’un fait l’effort de collaborer, d’être loyale et honnête, le tribunal ne peut qu’en tenir compte. Ce n’est pas la même chose que Nabonswende Sawadogo et autres qui ne veulent rien reconnaître. C’est la raison pour laquelle j’ai dit que ce garçon méritait un regard particulier. Et j’ai dit en terminant qu’il pouvait être fier de lui et il pouvait être fier de ses enfants parce qu’il aurait contribué à l’histoire de ce pays.
L’histoire ne sera pas complète parce qu’on n’a pas la version de Blaise Compaoré, mais le fait d’avoir le début de l’histoire nous situe.
Le commando part de la villa de Blaise Compaoré, avec son véhicule personnel et son chauffeur personnel, alors il ne peut pas venir dire qu’il ne savait rien ou que le commando partait pour arrêter le président. Je crois que c’est une version qui ne peut plus tenir aujourd’hui. Pour interpeller Thomas Sankara on n’a pas besoin d’être armée comme il (le commando, ndlr) l’était. Huit (8) à dix (10) personnes avec des Kalachnikovs, des fusils mitrailleurs. On ne va pas pour arrêter le président Sankara avec des armes qui tuent. Les experts nous ont dit ici qu’à 25 mètres ces armes vous transpercent. On a complètement liquidé Thomas Sankara à 3-5 m. Donc on n’allait pas pour l’arrêter, mais pour le liquider. Et j’ai expliqué pourquoi on voulait le liquider. Parce que Blaise Compaoré ne peut supporter Thomas Sankara. Il ne pouvait pas vivre avec Thomas vivant. Même si on met (Thomas Sankara) en prison, il était évident que les gens dans la rue vont descendre pour casser les prisons par ce que Thomas Sankara est un personnage charismatique. Raison pour laquelle j’ai utilisé le terme sankarite que je définis comme la maladie qu’avait Blaise Compaoré de ne pas supporter le charisme de Thomas Sankara. Et il ne pouvait pas ne pas le liquider. Thomas Sankara l’a dit : tuez Sankara et des milliers de Sankara naîtront« .
En rappel, Yamba Elysée Ilboudo est poursuivi dans ce dossier Thomas Sankara, pour assassinat et attentats à la sûreté de l’État.
Mathias Kam (Stagiaire)
Minute.bf