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mardi 19 mars 2024

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Raïnatou Sawadogo, maire de l’arrondissement 3 de Ouaga : « On m’avait jugée trop tôt »

A la faveur des élections municipales de 2016, seulement 10 femmes ont été élues maires alors que le Burkina Faso compte 351 communes. Parmi ces femmes, Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo, maire de l’arrondissement 3 de Ouagadougou. A peine installée dans ses fonctions de maire que sa gestion a été contestée par une partie des conseillers. Son arrondissement va donc traverser une zone de turbulence dont le paroxysme a été atteint avec le dépôt, par lesdits conseillers, d’une motion de défiance à son encontre, le 31 mars 2017. Aujourd’hui, la mairie « se porte bien » car les conseillers sont « revenus à la raison », nous confie-t-elle, sourire aux lèvres. Dans cette interview accordée à votre journal en ligne Minute.bf, Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo nous parle de son arrondissement, les actions menées au cours de ses quatre années de fonction, son ambition politique et sa vision pour le développement de l’arrondissement 3 de Ouagadougou.

Minute.bf : Comment se porte aujourd’hui la mairie de l’arrondissement 3 de Ouagadougou quand on sait qu’à un certain moment, des conseillers avaient réclamé votre départ, qualifiant votre gestion de mauvaise, une gestion qui, selon eux, ne favoriserait pas le développement de l’arrondissement ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: À ce jour, je peux vous dire que l’arrondissement se porte mieux et sa santé est parfaite. Les conseillers se sont mieux organisés pour travailler à rattraper le temps que nous avons perdu. Vous avez souligné dans votre propos que les conseillers estimaient que ma gestion était mauvaise, un jugement que je trouvais très précoce. Je rappelle que nous avons été élus le 19 juin. Quand nous sommes arrivés, nous avons trouvé les délégations spéciales en place avec le PDS qui avait déjà fait une grande partie du fonctionnement de l’année 2016. Nous avons eu la chance d’avoir notre budget pour 2017, malheureusement, en moins de six mois de gestion, si l’on peut déjà trouver quelque chose à dire sur ma gestion, moi je trouvais cela très précoce. Donc, je pense que les conseillers s’étaient trompés, voilà pourquoi la crise est née. Quand ils se sont rendus compte, chacun a rangé son sentiment, et nous voilà aujourd’hui ensemble. Nous arrivons à collaborer pour le bon déroulement des activités et la bonne marche de notre arrondissement.

Minute.bf : Faut-il dire qu’aujourd’hui vous travaillez en parfaite collaboration avec les conseillers frondeurs ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Aujourd’hui, je ne parle plus de fronde, parce que, comme je l’ai dit plus haut, une fois que les conseillers sont revenus à la raison, on ne parle plus de fronde. Parler de frondeurs de nos jours, dans notre arrondissement, c’est encore jeter de l’huile sur le feu ; toute chose qui n’arrangera pas notre arrondissement. C’est cette cohésion qui avait manqué au départ, cette vision de travailler main dans la main pour le développement de notre cher arrondissement qui avait manqué. Mais je puis vous assurer que depuis l’arrivée des conseillers, nous travaillons ensemble, en parfaite collaboration.

Dire qu’il n’y pas de problème aujourd’hui, ce sera trop dire, parce qu’une fois que la méfiance s’installe, il est assez difficile de rétablir cette confiance. Nous ne sommes pas là pour nous-mêmes. Nous sommes là pour travailler à soulager les populations qui nous ont fait confiance. Je peux vous assurer que de mieux en mieux, nous avançons dans ce sens.

Minute.bf : À l’époque, les conseillers qui vous accusaient de mauvaise gestion ont même affirmé que vous avez construit un duplex sur le dos des contribuables. Qu’en est-il exactement ?

« Nous sommes en politique et tout ce qui peut se dire pour saper le moral ou salir le nom de son adverse politique est possible… »

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: (Rire). Justement, c’est la raison pour laquelle je vous disais tantôt que le jugement porté sur ma gestion était trop précipité. Avant d’être maire, je suis issue d’une famille, je gère un foyer et je ne dormais pas dehors. Si en moins de six mois de fonctionnement on peut déjà construire des duplex, vous ne trouvez pas que c’est trop tôt ? Même s’il y avait des caisses d’argent ici et qu’on avait cette possibilité de puiser à notre guise, je trouve impossible de construire un duplex en si peu de temps. Ceux qui ne sont pas au sein du conseil d’arrondissement et ceux qui sont proches, chacun vous dira la même chose parce qu’en moins d’un an de fonctionnement, quels que soient les avantages qu’il y a autour de la fonction, il sera trop tôt de construire des duplex.

Mais c’est normal ; nous sommes en politique et tout ce qui peut se dire pour saper le moral ou salir le nom de son adverse politique est possible. C’est cette mauvaise politique que j’ai regrettée. En toute bonne foi et conscience, on sait que, même une personne qui travaille et qui a un salaire, qui arrive à joindre les deux bouts, ne peut pas se construire les villas dont on a fait cas ici. Mais on ne peut pas empêcher les gens de dire ce qu’ils pensent.

Minute.bf : Après 4 années passées à la tête de cet arrondissement, quel bilan à mi-parcours, faites-vous de votre gestion ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Mon passage déjà à la tête de la mairie me laisse un grand souvenir. Faire la politique n’est pas donné à n’importe qui, surtout quand on est femme, on veut relever le défi en tant que femme au foyer, également relever le défi en tant que responsable, où toute une communauté pense que vous êtes la personne habilitée pour apporter les solutions aux différentes préoccupations.

C’était un mandat très dur pour moi. Même là où il y a eu la cohésion, ça n’a pas été facile pour eux, n’en parlons de chez nous où nous avons fait deux ans de fonctionnement sans un budget. Pourtant nous sommes venus apporter notre contribution à la construction de notre arrondissement pour répondre aux besoins des populations qui nous ont élus. Le bilan est positif à mon sens, parce que, malgré le manque de budget, malgré le manque de cohésion, nous avons réussi quand même à fonctionner, nous avons réussi à faire évoluer la mairie à travers la réalisation de plusieurs activités. Nous avons aussi réussi à réunir la population autour de nous et nous avons réussi à nous faire comprendre et accepter par cette même population qui a compris que c’était la force qu’on nous faisait, qui est restée derrière nous et qui a aussi apporté d’une manière ou d’une autre, sa contribution pour aider le conseil d’arrondissement à fonctionner, à rester débout, et aussi pouvoir travailler pour l’arrondissement.

Aujourd’hui je peux dire que je suis satisfaite, même si mon souhait était de pouvoir réaliser de grands chantiers. Il faut dire que nous avons vraiment eu le souci d’apporter une réponse aux préoccupations des populations de l’arrondissement 3. Il est dommage que, jusqu’à présent, les arrondissements n’ont pas une autonomie qui leur permet de mieux toucher du doigt la réalité et de pouvoir poser des actions concrètes au profit des populations. Le problème se situe au niveau de la commune de Ouagadougou. Du fait que tout est centralisé, quelle que soit ta bonne volonté, quelle que soit ton souci de bien faire, si les moyens ne permettent pas de réaliser quoi que ce soit, il est difficile de dire que notre objectif est atteint. Nous ne sommes pas venus pour regarder les murs. Nous sommes venus pour construire, nous sommes venus pour réaliser des caniveaux, nous sommes venus pour construire des routes, des infrastructures de diverses natures au profit de nos populations. Si on n’a pas les moyens d’atteindre ces objectifs, ça fait toujours mal au cœur. Aujourd’hui, les arrondissements n’ont pas autres moyens que ce que la commune de Ouagadougou leur sert. Cependant, quelle que soit la bonne volonté du conseil municipal, il lui sera assez difficile d’atteindre ces objectifs cités plus haut.

Nous avons par exemple à la mairie ici, un bâtiment délabré, qui ne répond même plus au nom de l’arrondissement 3. Si les arrondissements étaient autonomes, on allait quand même pouvoir faire ce travail de réfection pour montrer aux populations que nous sommes là pour elles. Malgré tout, nous faisons des efforts avec nos partenaires, aussi, en partant vers les populations et les bonnes volontés, qui nous aident vraiment à construire petit-à-petit. Nous pensons qu’avec cette lutte que nous nous sommes prêtés à mener, nous pourrons avoir des résultats satisfaisants.

Minute.bf : Quelles recommandations avez-vous donc à faire pour que les mairies d’arrondissement puissent être autonomes afin de travailler librement pour répondre aux besoins des populations ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: En toute sincérité, mon souhait le plus ardent est que les plus hautes autorités de ce pays se penchent sur la question parce que, qui parle de développement, parle d’investissement. Sans investissement on ne peut pas parler de développement. A ce jour, c’est comme si nous étions repartis à la case départ. Nous sommes venus trouver des acquis, au lieu de travailler à aller de l’avant, pour renforcer les acquis, nous ne faisons que marcher à petits pas. C’est la faute aux dirigeants, aux politiques, si nous nous retrouvons dans cette situation. Voilà pourquoi je souhaite vivement que cette politique cesse parce que les populations n’attendent que des réalisations infrastructurelles dans leurs communes pour l’amélioration de leur vie. Je salue au passage la population de l’arrondissement 3 parce qu’à chaque fois que nous lui faisons appel, cette brave population se lève et s’aligne derrière nous pour nous soutenir. Je suis sure que s’il y a un petit effort qui s’effectue dans ce sens, en plus des efforts que la population fournit, nous allons engranger des résultats que nous voulons atteindre. Nous voulons aussi laisser derrière nous des acquis, nous voulons qu’on parle de nous après nous.

Minute.bf : Quels sont vos rapports avec le maire de la commune de Ouagadougou, Armand Pierre Béouindé, quand on sait que dans certaines de vos sorties, vous déclariez qu’il était contre le développement de votre arrondissement ?

Vidéo : La réponse du maire de l’arrondissement 3, à la question posée plus haut

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo appelle le maire central, Armand Pierre Béouindé à plus de collaboration avec les maires d’arrondissement

Minute.bf : Vous l’avez même reconnu. Une femme en politique parmi les hommes dans un pays comme le Burkina Faso, ce n’est pas facile. Aujourd’hui vous êtes maire de l’arrondissement 3. Beaucoup de personnes s’identifient à vous. Dites-nous comment êtes-vous arrivée en politique ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Je suis arrivée en politique par souci d’apporter ma pierre à la construction de mon pays, en particulier, mon arrondissement parce que je suis issue de l’arrondissement 3 de Ouagadougou. Je voyais les choses de loin. Je me suis posé la question à savoir, pourquoi ne pas m’approcher pour apporter ma contribution à la construction de mon arrondissement ? J’ai trouvé qu’en m’engageant en politique c’était le canal propre sur lequel je pouvais m’appuyer pour dire ce que je pense, qui puisse contribuer au devenir de mon arrondissement. C’est ce qui a prévalu à mon engagement, et quand je suis venue, comme vous le savez, lorsqu’une femme s’engage pour une chose, elle le fait avec le cœur. Ainsi, malgré les secousses, nous avons tenu pour donner l’espoir aux autres femmes, de venir apporter ce qu’elles peuvent apporter, pour la construction de la nation.

Quand on s’engage en politique, on doit se préparer à faire face à des difficultés et aussi saisir les opportunités. Ce que j’ai pu réaliser en quatre ans de mandat place l’arrondissement 3 devant les autres arrondissements, quand bien même notre mairie a connu, à un certain moment, des grognes au sein des conseillers. Je peux dire que c’est mon engagement, mon souci aussi d’apporter ma pierre à la construction de mon arrondissement qui a prévalu ces résultats.

Le maire Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo officiant un mariage

Minute.bf : Est-ce à dire qu’il n’y a pas de sessions organisées par la commune de Ouagadougou pour recueillir les difficultés que traversent les arrondissements et projeter des solutions globales pour le développement de tous ces arrondissements ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Ce n’est pas qu’il n’y a pas de sessions. Les sessions sont organisées selon les textes en vigueur. Un maire d’arrondissement ou un maire de la commune de Ouagadougou a obligation de tenir au moins quatre sessions par an, et des sessions extraordinaires en cas de besoin, s’il y a vraiment des questions qui nécessitent que le conseil se réunisse. Mais une commune à statut particulier comme Ouagadougou qui regroupe douze arrondissements, qui n’arrive pas à trouver un cadre d’échanges avec les maires d’arrondissement et pouvoir s’organiser, pensez-vous que c’est une chose aisée ? Il est vrai que les sessions sont des cadres qui s’offrent aux conseillers de s’exprimer mais il y a des préalables. Avant de venir aux sessions, si les maires pouvaient se réunir, ce sera l’occasion pour eux de dire ce que l’on doit faire pour le bien de la population, ce, avant de se retrouver en plénière, en présence de tous les conseillers, pour présenter, demander et recueillir l’avis des autres conseillers. Malheureusement ce n’est pas ce que nous vivons.

Même si ça ne va pas, tout ne peut pas se régler en session. Une chose est de venir aux sessions, une autre chose est de dire ce que tu peux apporter comme contribution. Aussi, faudrait-il que cela soit pris très au sérieux par le maire. Si l’on n’a pas l’occasion de dire ce qu’on pense en session, à quoi sert de se présenter aux sessions ? Mieux, il faut préciser que les sessions se préparent. Ce qu’on peut se dire entre responsable peut ne pas être forcément dit devant tous les conseillers. C’est lorsqu’on n’arrive pas à s’organiser qu’on s’expose publiquement. C’est la raison pour laquelle il y a des interventions de contestation qui fusent de partout dans ce sens.

Minute.bf : Aujourd’hui, quelle sont les ambitions que vous avez pour votre arrondissement ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Mon souhait aujourd’hui, c’est de voir mon arrondissement émergé. L’émergence, ce ne sont pas les paroles. L’émergence c’est de construire. Je vous prends l’exemple du secteur 13, le village de Zongo, qui ne connait ni route, ni infrastructure sanitaire aujourd’hui. Je serai satisfaite et très heureuse de voir toutes ces infrastructures se réaliser sous mes yeux. C’est de cette émergence que je parle. Faire des caniveaux pour l’évacuation des eaux, pour éviter les inondations qui sont courantes actuellement ; créer des routes ; faciliter la vie des populations en réalisant beaucoup de choses pour elles. Ma vision aujourd’hui, c’est de voir mon arrondissement aller de l’avant.

Minute.bf : Quelles sont donc vos ambitions politiques ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Aujourd’hui, pour vous dire la vérité, je ne suis pas satisfaite de mon engagement en politique. C’est pour vous dire que je suis ambitieuse aujourd’hui parce que je veux atteindre mon objectif. Et pour atteindre mon objectif, il faut que je mouille le maillot davantage, il faut que je me fasse de la place. Je veux qu’on parle du maire de l’arrondissement 3 à travers des actions concrètes et comme je suis ambitieuse, je n’entends pas m’arrêter là.

Minute.bf : Le président Zéphirin Diabré a été désigné et investi par votre parti, l’UPC, pour être candidat à l’élection présidentielle de novembre prochain. Comment vous vous organisez au sein de votre parti, pour les élections couplées à venir ?

Nous avons désigné et investi notre candidat le 25 juillet 2020. C’était là, une étape. L’autre étape consistera pour nous à travailler à faire de ce monsieur, le président du Faso. Il a vraiment soif d’apporter le changement, il a soif de réunir les Burkinabè pour le bien du pays, pour faciliter la vie des Burkinabè dans tous les sens. Pour ce faire, nous sommes en train de nous organiser, parce que nous sommes très bien structurés, et le travail qui reste est de convaincre les Burkinabè à porter leur confiance et leur choix sur le docteur Zéphirin Diabré, le leader charismatique, le leader qui réunit tous les atouts, pour faire du Burkina Faso, un pays qui va émerger, un pays qui va reconnaitre son visage d’antan.

Minute.bf : Nous sommes à la fin de l’entretien. Avez-vous un message particulier à l’endroit de votre population ?

Raïnatou Ouédraogo/Sawadogo: Je vous dis merci de m’avoir donné l’occasion de parler de mon arrondissement et de mon parti. Ce que je demande aujourd’hui, est que Dieu tende sa main sur tout le pays afin que les Burkinabè se mettent tous ensemble pour travailler à ce que la paix, la sécurité et la stabilité reviennent, pour qu’ensemble, nous puissions construire nos arrondissements, nos communes, nos régions et tout le pays en général, pour le bien-être de nos populations.

Je souhaite une bonne santé à tous les Burkinabè et en particulier, la population de l’arrondissement 3 de Ouagadougou qui a de l’estime pour moi. Je promets de mouiller le maillot, de donner le meilleur de moi-même pour mériter cette confiance placée en moi.

Ensemble, autour du maire de l’arrondissement 3 pour porter Zéphirin Diabré à la magistrature suprême!

Entretien réalisé par Armand Kinda
Minute.bf

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