Inspiré par le boom minier et son lot de conflits, Rasmané Daniel Sawadogo, pour l’obtention de thèse de PHD/doctorat en sciences politiques, juridiques et de l’administration, option médiation, gestion des conflits et paix, s’est proposé de réfléchir sur le thème : « La médiation dans la résolution des conflits miniers au Burkina Faso ». Alliant des méthodologies empruntant du droit à l’économie, en passant par la sociologie et de la philosophie, l’impétrant a analysé les enjeux de la médiation dans la gestion des conflits miniers, résumant les résultats de sa recherche dans cette phrase : « la justice tranche, mais la médiation apaise, règle, lie, relie, établit et rétablit les liens sociaux, économiques et culturels ». Son document a été déclaré recevable par le jury qui l’a sanctionné de la mention « Très honorable ».
Depuis le début des années 2000, le Burkina Faso connaît un boom minier principalement dans le secteur aurifère. Cela a engendré une fréquence des conflits liés aux activités minières.
Les principales parties prenantes dans ces conflits, a fait noter l’étudiant Rasmané Daniel Sawadogo, sont « la mine et les communautés (60,34%); la mine et les orpailleurs (23,46%) ; agent de la mine avec la communauté (11,17%); la mine avec les autorités locales (10,61%), communauté et autorités locales (3,35%), entre orpailleurs (2,79%)… ».

Des principales causes liées à ces conflits, l’on a, « l’occupation des terres des propriétaires terriens (56,68%); la non-réalisation des promesses de la mine (33,60%), les communautés locales non associées à la signature du contrat (31,58%), la profanation des lieux de culte traditionnel (27,94%), l’envahissement des mines par les orpailleurs (22,67%)… ». Dès lors, comment résoudre et gérer ces conflits ?
« La médiation offre une alternative susceptible de préserver le lien social… »
Face à ces chiffres, les conflits miniers se présentent comme une question majeure dont la résolution intéresse l’étudiant Rasmané Daniel Sawadogo, qui s’est proposé de mener la réflexion sur le thème : « La médiation dans la résolution des conflits miniers au Burkina Faso ».
La médiation, a défini l’étudiant, « désigne tout processus dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir à une résolution amiable d’un litige, d’un rapport conflictuel ». C’est un mode alternatif de résolution des conflits reconnus aux plans national, sous-régional et international.

En effet, sachant que conflits miniers fragilisent, « la cohésion sociale (77,33%) », entraîne la « méfiance ou la rupture de confiance (67,61%) », sans compter les arrêts de travaux (49,39%) voire la fermeture de la mine (34,41%), et même des pertes en vies humaines (43,72%), l’impétrant pense que la médiation est la démarche indiquée pour leur résolution. Cela, après avoir enquêté auprès de 200 personnes dont 30,85% préfèrent passer par la médiation, afin de résoudre leurs conflits ; 28,72% par entente, 12,77% pour la voie traditionnelle, 11,7% pour l’option de la justice, et 15,96% pour les autres mécanismes de résolution des conflits. « Nous pensons qu’on peut utiliser la médiation pour résoudre les problèmes. La justice tranche, mais la médiation apaise, règle, lie, relie, établit et rétablit les liens sociaux, économiques et culturels », a-t-il soutenu.
Précisément, pour M. Sawadogo, « si la flexibilité inhérente aux procédures de médiation suscite, chez certains défenseurs des droits fondamentaux, des réserves, quant à l’équité des solutions qu’elle produit, il convient de rappeler que la rigidité de la justice étatique peut, elle aussi, engendrer des tensions sociales profondes voire des divisions durables ».

Partant, il a maintenu que « la médiation, par son approche inclusive et adaptative offre une alternative susceptible de préserver le lien social tout en favorisant des solutions plus apaisées » pour « préserver une bonne cohabitation entre les populations et les entreprises minières au Burkina Faso ».
Mention « Très honorable » pour « un travail d’intérêt général »
A l’issue de la présentation, le jury a salué la qualité du travail de l’impétrant.
Le Directeur de thèse de l’impétrant, Pr Vincent Zakané, enseignant en droit à l’Université Thomas Sankara a loué l’engagement et la détermination de l’étudiant. « Il a eu le courage de traiter un sujet de droit alors qu’il n’est pas juriste de formation. Ce n’était pas facile, mais il a fait l’effort durant nos trois années de collaboration, de se remettre en cause pour maîtriser les concepts de base. Je suis admiratif de ce qu’il a fait, car il a accepté de rejeter des parties entières de son document, pour se mettre sur la bonne voie », a-t-il fait observer, tout en soulignant l’originalité du thème qui, à partir d’un mécanisme classique en droit (la médiation) a abordé un domaine presque nouveau : celui des mines.

Pour le président du jury, le Pr Alkassoum Maïga de l’Université Joseph Ki-Zerbo, « la science également, c’est de prendre en compte, l’intérêt général et l’intérêt de la nation ». « Toute réflexion qui peut apporter un minimum de tranquillité pour notre pays, surtout dans ce contexte où on est sur plusieurs fronts, doit être saluée », a postulé le président du jury.
Sur ce, il a déclaré : « le jury a estimé que le doctorant a fait preuve d’une bonne démarche et traité une bonne thématique, qui d’ailleurs est d’actualité ». Cela s’est traduit par la mention « Très honorable » qui a sanctionné le document de l’impétrant, le jugeant digne du grade de Docteur, sous les applaudissements, des parents, familles et amis qui ont fait le déplacement pour assister à la soutenance.
Mais le désormais Dr Rasmané Daniel Sawadogo n’entend pas s’arrêter là. Encouragé par les observations et mots des différents membres du jury, Dr Sawadogo dont les travaux de recherches ont concerné 5 sociétés minières du Burkina Faso, « au regard de la transversalité des enjeux communs à plusieurs entreprises minières en Afrique », pense qu’il faille « envisager une étude spectre régional ».
Il a également avancé qu’il est envisageable de mener la « médiation transfrontalière ».

Mieux, Dr Sawadogo entend vulgariser les résultats de ses recherches et mettre son expertise à contribution pour la résolution des conflits miniers, en faisant dans la consultation. « Nous envisageons la création d’un cabinet de médiation, de conciliation et d’arbitrage », a-t-il signifié.
Franck Michaël KOLA
Minute.bf