Le procès charbon fin a suivi son cours, ce lundi 27 novembre 2023, au Tribunal de grande instance (TGI) Ouaga 1. Après une heure de suspension, le tribunal a fait appeler à la barre, le Directeur général de la société minière Essakane SA, pour qu’il se prête aux questions du parquet.
Le parquet a souhaité que le Directeur général d’Essakane SA, s’explique sur le fait qu’il y ait une variation entre le taux d’humidité du charbon fin de la société minière Essakane et celui que l’expertise a fait ressortir. Selon le parquet, « le taux d’humidité contenu dans le charbon fin d’Essakane et celui fourni par les experts est différent avec des variations allant jusqu’à 40% ».
Le directeur de la société minière Essakane SA a fait savoir que cela est dû au temps que la cargaison a mis avant d’être soumise à l’analyse. De ses dires, une autre expertise sur la cargaison, actuellement, révélerait des taux d’humidité différents des deux premiers taux. « Est-ce que vous confirmez que ce taux d’humidité ne saurait impacter sur la teneur en or du charbon ? », a demandé en outre le procureur. « Je me réfère à ce qu’a dit l’expert sur la question, qui est qu’il n’y a aucune corrélation entre l’humidité et la teneur en or », a répondu, pour sa part, Tidjane Barry, poursuivant qu’aucune règlementation n’impose à sa société une teneur dans le traitement du charbon fin. « Du reste, vous avez vous-même suivi, l’expertise a donné une teneur qui est inférieure à la teneur que nous, nous avions donné », a-t-il souligné.
Les débats entre le parquet et le DG d’Essakane, se sont par la suite accentués sur la taille du tamis utilisé pour récupérer le charbon fin. À une question du procureur sur la taille du tamis utilisé par Essakane, le prévenu affirme que sa société utilise un tamis d’une taille de 1 millimètre. Ce qui pose problème, selon le parquet, parce que pendant la présentation du rapport d’expertise, le directeur avait laissé entendre que le tamis utilisé par la société minière avait une taille de 630 microns. « On vous a tous entendu dire ici que le tamis utilisé par Essakane était celui de 630 microns. Ce n’est pas nous qui l’avons dit, ni les experts, c’est vous-même qui l’aviez dit. Aujourd’hui, vous affirmez que c’est maintenant celui de 1mm et non 630 microns. Si vous voulez aussi revenir sur ce que vous aviez dit, faites-le nous savoir ! », a martelé le parquet. « Je réaffirme ici que le tamis à prendre en compte est un tamis de 1 millimètre et non un tamis de 630 » a répondu sèchement sieur Tidjane Barry. A ce stade, le tribunal a demandé au greffe de prendre note de cette réponse.
Le parquet a, ensuite, souhaité que les experts reviennent à la barre. A l’un des experts qui s’est présenté, le procureur a posé la question de savoir : « si l’on peut utiliser un tamis de 1mm pour récupérer du charbon fin ». Ce dernier a répondu par la négative ajoutant, cependant, que dans le processus de récupération de son Charbon fin, la société Essakane SA se sert de deux tamis. « Il y a un premier tamis de 1mm qui est utilisé. Et en allant vers la fin du processus de récupération du charbon fin, il y a un tamis de 630 microns qui permet de récupérer ce qu’on appelle du charbon grossier », a-t-il expliqué. Le procureur a dit prendre note.
Il a par ailleurs avancé que le fait que des briques réfractaires, des scories, des pulpes aient été retrouvés dans la cargaison de charbon fin de Essakane SA s’explique tout simplement par une volonté de la société Essakane de « détourner » des matériaux précieux sur lesquels elle n’a pas un permis d’exploitation. « Ce que nous ministère public, nous comprenons de cette affaire, c’est que lors de votre exploitation, vous avez retrouvé de nouveaux matériaux et comme vous n’avez pas de permis d’exploitation pour ces matériaux, vous les avez engouffrés dans ce que vous avez appelé cargaisons de charbon fin pour aller les traiter à l’extérieur. C’est tout simplement ce que, nous ministère public, nous retenons de cette affaire », a déduit le Procureur.
Le DG d’Essakane a protesté contre cette affirmation en invitant le parquet à rester sur les faits pour lesquels sa société est poursuivie. « Les faits pour lesquels nous sommes à la barre dans ce dossier sont très clairs. On nous reproche d’avoir minoré la quantité de l’or en majorant le taux d’humidité. Ce serait intéressant qu’on reste sur ces faits », a répondu le prévenu ajoutant que « ce n’est pas pour cette infime quantité d’or que Essakane va se lancer dans de telles choses ».
A la suite de ces échanges entre le parquet et le Directeur général d’Essakane SA, le Tribunal a fait venir l’expert externe Yonli ( l’expert du parquet ndlr) pour une présentation des résultats que son analyse a révélé sur le taux de l’humidité du charbon fin. Après la projection, le président de la chambre a souhaité que les deux experts judiciaires fassent des observations sur ces résultats. Mais les experts ont estimé qu’ils ne peuvent pas commenter ces résultats, car, pour eux, « le processus d’échantillonnage de M. Yonli n’est pas scientifique. Nous ne pouvons pas commenter ces résultats parce que nous estimons que son procédé ne respecte pas le processus scientifique normal d’échantillonnage », a déclaré l’un des experts. Le tribunal a dit prendre note avant d’inviter l’expert Yonli à regagner sa place.
L’audience a été suspendue à 16h. Elle reprendra demain mardi à 10h.
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Oumarou KONATE
Minute.bf