Gaston (nom d’emprunt) n’avait sans doute pas imaginé que son séjour au Burkina Faso se terminerait devant un tribunal. Le lundi 10 février 2025, cet enseignant ivoirien d’origines burkinabè, la quarantaine bien entamée, a comparu devant la justice burkinabè pour vol de moto. La conséquence d’un moment d’égarement, selon lui.
Tout avait pourtant bien commencé. Gaston était venu au Burkina pour des raisons familiales, après le décès de son père. Après un mois passé auprès des siens, il s’apprêtait à rentrer en Côte d’Ivoire en transitant par le Ghana. Mais à Tiébélé, où il a fait escale, tout a basculé.
Assis devant une boutique, il observait distraitement les allées et venues des clients quand un homme a garé sa moto juste devant lui, laissant les clés sur le contact. Un instant, une impulsion, et Gaston s’est levé.
En quelques secondes, il a enfourché la moto et a disparu. Direction Ouagadougou. Pourquoi a-t-il fait cela ? Lui-même ne sait pas. « Je ne sais pas ce qui m’a pris », lâche-t-il à la barre, tête baissée, les larmes aux yeux. Il jure que ce n’est pas dans ses habitudes, qu’il a même une moto en Côte d’Ivoire, et qu’il regrette son geste. « J’ai galéré pour avoir mon poste d’enseignant là-bas ! Je suis Burkinabè d’origines, naturalisé ivoirien. Malgré tout, ils m’ont accepté dans la fonction publique ivoirienne. Pourquoi j’irais gâcher ça ? J’ai même une moto Apsonic chez moi à Abidjan. Les clés et les documents sont toujours à la Maco. Vous pouvez vérifier. Je demande sincèrement pardon », regrette-t-il, en pleurs, devant le tribunal.
Mais le tribunal n’est pas là pour entendre des regrets. Et la juge de le recadrer très vite : « Arrêtez-nous ça ! Ici, vous assumez vos actes. Ce n’est pas une affaire de sorcellerie ! Personne ne vous a obligé à prendre la moto ».
Le parquet, de son côté, ne croit pas une seconde à la théorie d’un quelconque envoûtement. Pour l’accusation, Gaston savait exactement ce qu’il faisait. Après avoir volé la moto, selon le parquet, il aurait tenté de la revendre à Tiébélé, sans succès. Ne trouvant pas preneur, il se serait dirigé vers Ouagadougou, bien décidé à falsifier les documents de l’engin pour le revendre plus facilement. C’est dans ces démarches frauduleuses qu’il a été pris la main dans le sac. « Ne vous laissez pas berner par ses larmes de crocodile Mme le juge ! », a martelé le procureur, convaincu que Gaston est un habitué du vol.
Face à ces accusations, le parquet a requis que le prévenu soit reconnu coupable et condamné à une peine de 24 mois de prison, dont 12 ferme, et une amende de 500 000 FCFA également ferme.
Gaston, lui, n’a plus que l’espoir d’un jugement clément. En derniers mots, il a affirmé regretté son acte et dit placer tout son espoir entre les mains du tribunal qui rendra son verdict le 17 février prochain. Il dit espérer bénéficier d’une clémence qui lui permettra de regagner ses salles de classe de l’autre côté de la lagune Ebrié.
Oumarou KONATE
Minute.bf