dimanche 22 décembre 2024
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Burkina : L’impact de la bureaucratisation du secteur minier artisanal sous la loupe du Dr Tongnoma Zongo

Dr Tongnoma Zongo, Chargé de recherche l’institut des sciences des sociétés (INSS) du CNRST et Spécialiste des questions minières a analyser l’impact de la bureaucratisation et de l’encadrement du secteur minier artisanal au Burkina Faso. Les résultats de l’étude ici ⤵️

Thème : Bureaucratisation et encadrement du secteur minier artisanal au Burkina Faso

Résumé

Ce document de vulgarisation tiré de l’article scientifique intitulé « Politique publique de formalisation de la mine artisanale et bureaucratisation au Burkina Faso : une cohabitation difficile ? publiée par le Laboratoire de Recherche sur la Dynamique des Milieux et des Sociétés (LARDYMES) du Département de Géographie, Faculté des Sciences de l’Homme et de la Société, Université de Lomé. Juin 2024 ISSN 1993-3134 analyse l’impact de la bureaucratisation sur l’encadrement du secteur minier artisanal
De nos jours, l’expansion considérable de l’exploitation minière au Burkina Faso est allée de pair avec un accroissement et une intensification des conflits sociaux. Si ces conflits sont divers et évoluent en fonction de la gouvernance attribuée à la mine industrielle et à la mine artisanale, ils butent contre la stratégie répressive de l’État. Il importe dès lors de jeter un regard sur les stratégies bureaucratiques mises en œuvre par les acteurs du secteur minier pour relever le défi de la justice sociale et environnementale.
Introduction
Pendant ces dernières années, la gouvernance des ressources minières au Burkina Faso est caractérisée par des conflits récurrents. Ces conflits ont des effets néfastes sur le plan social, économique, politique et environnemental. L’un des problèmes majeurs de la persistance de ces conflits est le comportement bureaucratique des acteurs de la gouvernance du secteur minier Burkinabè (Zongo T, 2024). Les inégalités économiques, la corruption et la mauvaise gouvernance sont également des facteurs clés qui contribuent à l’augmentation de ces conflits dans les zones de production minière. Dans cet article, nous examinerons les mobiles des conflits liés à la gouvernance minière tout en jetant un regard sur les impacts socio-économiques et environnementaux de ces conflits dans les zones de production minière.

Méthodologie

Cette étude se focalise davantage sur les enjeux de la gouvernance du secteur minier par la bureaucratisation. La gouvernance de l’exploitation minière de l’or dans les sites d’orpaillage du Burkina Faso préoccupe autant les acteurs du secteur minier, les partenaires techniques et financiers, des ONG et le ministère des mines du Burkina Faso dans ce contexte d’insécurité marqué par les attaques des groupes terroristes. Dans l’optique d’atteindre les objectifs de notre étude, nous avons mené une revue de littérature sur la question et par la suite nous avons mené des entretiens auprès des personnes et des structures indispensables du secteur minier. Ces entretiens ont été menés auprès artisans miniers, l’association des orpailleurs, les agents du ministère des mines, les vendeurs des produits chimiques, la direction de l’action sociale etc.

Résultats et discussion des résultats

Responsabiliser pour faire triompher la gouvernance bureaucratique dans le secteur de l’EMAPE
La responsabilisation est un processus complexe qui commence par la prise de conscience de l’absence de tout pouvoir (en matière de prise de décision) ainsi que de tout droit d’accès à un tel pouvoir. C’est grâce à la responsabilisation que les acteurs du bas du secteur minier au Burkina Faso pourront activement participer à un processus de prise de décision, autrement dit accéder à de nouveaux espaces de gouvernance. Si la responsabilisation n’est pas basée sur le dialogue et le respect mutuel, des conflits sociaux pourront survenir et mettront en péril les chances de succès des politiques dans l’encadrement du secteur de la mine artisanale. Ce manque de responsabilisation oblige les artisans miniers à se muer en groupe de pression lorsque le pouvoir politique tente d’annihiler leur existence en les enfermant dans un carcan de normes juridiques. L’approche institutionnelle dans le secteur de l’EMAPE biaise l’analyse sociologique du phénomène de l’orpaillage. Or celle-ci gagnerait à s’inscrire dans le sillage de la sociologique dynamique et appréhender le réel pour parvenir à un meilleur encadrement du secteur de l’EMAPE. C’est dans ce même sens qu’un de nos interlocuteurs avance que : 
 La plupart des conflits miniers enregistrés dans le secteur de la mine artisanale relève du cloisonnement des agents du ministère des mines et de l’énergie du Burkina Faso envers les acteurs du bas du secteur de la mine artisanale.
Une autre estime qu’il faudra Responsabiliser les acteurs du bas du secteur minier afin qu’ils soient en mesure de faire face aux maux qui minent le secteur de la mine artisanale.
De ce fait sans une responsabilisation adéquate des artisans miniers dans la gouvernance du secteur, les mécanismes de gouvernance des sites institués par les orpailleurs de concert avec les populations locales continueront de gagner du terrain dans les sites d’orpaillage du Burkina Faso
La gouvernance du secteur par la bureaucratisation est-elle sources de conflits et d’accidents ?
Depuis la liquidation du comptoir Burkinabè des métaux précieux en 2006, le secteur de l’EMAPE demeure toujours un secteur mal maitrisé par les autorités en charge des questions minières du Burkina Faso. L’exploitation artisanale de l’or est devenue une activité économique indispensable pour bon nombre de ménages en milieu rural mais en grande partie dehors du contrôle ou même de la connaissance de l’Etat. Des institutions informelles régissent la majorité des opérations minières, y compris leurs interactions et leurs relations avec les autorités locales, les chefs coutumiers et les communautés en général. Malgré la création de l’ANEEMAS jusqu’à sa transformation en SONASP en 2023, il convient de mentionner que l’approche adoptée par l’Etat est fondamentalement centralisée, avec une implication minimale des collectivités territoriales. Cette situation rentre en contradiction avec la vision de l’ANEEMAS sur l’encadrement du secteur. Le mandat assigné aux autorités locales reste très faible dans le secteur des mines au Burkina Faso. Bien qu’elles soient au moins censées être consultées lors de la procédure d’attribution des licences minières, y compris les autorisations d’exploitation artisanale (AEA), en pratique ce n’est que rarement le cas. La cohabitation entre les sociétés minières, qu’elles soient en phase de production ou en exploration, avec les orpailleurs est souvent source de conflits. Ces relations difficiles viennent du fait que l’Etat éprouve des difficultés à réguler le secteur de l’exploitation minière artisanale. D’une manière générale les conflits ont pour causes les lourdeurs administratives et le manque d’efficacité dans la régulation du secteur. Les inégalités, le sentiment d’injustice et les promesses non tenues par les sociétés minières industrielles en sont également les causes fondamentales des conflits miniers. La multiplicité de ces conflits trouve sa justification du fait que le gouvernement Burkinabé à travers sa gouvernance bureaucratie du secteur contribue à la restriction des zones d’orpaillage au profit des sociétés minières industrielles.
Au-delà des conflits, les trous tuent dans les sites d’orpaillage du Burkina Faso
Au-delà des conflits, l’on enregistre des accidents de travail dans le secteur du fait que l’Etat Burkinabè brille par son absence dans la majeure partie des sites d’orpaillage du Burkina Faso. Les accidents et les éboulements sont très fréquents du fait du non-respect de l’espacement normal dans les sites d’orpaillage qui est de 5 mètres entre les différents trous dans un site d’orpaillage au Burkina Faso. Cette situation engendre plusieurs cas d’éboulements. A titre d’exemple, le 22 octobre 2022 à Dossi, commune de Boni on a enregistré 4 victimes. Le 14 octobre 2022 à Gassin, commune de Tougouria on a enregistré 27 morts lors d’un éboulement. Même si les morts accidentels de travail relèvent de l’orpaillage il convient de mentionner que les mines industrielles ne sont pas en reste. Le 16 avril 2022 ,8 personnes sont morts par noyade dans la mine industrielle de perkoa. Entre 2010 à 2020, les accidents ont causé la mort de plus 300 personnes. Pour l’année 2022, le nombre de morts tourne autour de 140 personnes. Tous ces accidents peuvent être attribué à la gouvernance bureaucratique du secteur minier au Burkina Faso.

Conclusion

La gouvernance des ressources minière au Burkina Faso est marquée souvent par des conflits liés à la lourdeur administrative, aux inégalités économiques et à la marginalisation des communautés locales lors des prises de décisions. Ces conflits ont des impacts socio-économiques et environnementaux négatifs sur les communautés locales des zones de production minière du Burkina Faso. Cependant, il convient de mentionner qu’une bonne participation des communautés locales dans les prises de décisions de l’encadrement du secteur peut aider à prévenir et même résoudre ces conflits

Bibliographie

Diagne, A., Niane, B. et Tall, A. (2015). Les défis de la gouvernance des ressources naturelles en Afrique de l’Ouest: cas des industries extractives au Sénégal. Dans Conférence internationale de l’AFS (pp. 1-19).
Lahai, L. M. (2016). Ressources naturelles, conflits et développement durable : leçons tirées du delta du Niger. Journal of International Affairs, 69(1), 61-82.
Tongnoma ZONGO, 2024. Politique publique de formalisation de la mine artisanale et bureaucratisation au Burkina Faso : une cohabitation difficile ? 1 publiée par le Laboratoire de Recherche sur la Dynamique des Milieux et desSociétés (LARDYMES) du Département de Géographie, Faculté des Sciences de l’Homme et de la Société, Université de Lomé 19p.

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