Koudpoko, on a trop de problèmes ici au Faso. J’ai envie de dire que dans le monde entier, il n’y a pas un seul pays qui a actuellement nos problèmes. C’est vaste. Je suis dévasté. Mon cœur saigne. Mais il faut qu’on parle au prési, depuis ton cabaret.
Wendingoundi, passe moi un morceau de charbon, on va écrire sur le sol, photographier, et passer le téléphone à Tiiga, qui va se charger de le remettre au prési, juste pour qu’il lise. Il n’y a pas de stylo, encore moins de papier, car tout est devenu cher dans pays là. La connexion internet on n’en parle pas ????.
Prési, c’est bouillie Koudpoko cuisine pour nous, ce, chaque trois jours. Avant on mangeait viande chaque jour accompagnée de notre jus de Kæye. Mais presi, depuis un certain temps, nous buvons la bouillie ici au cabaret de Koudpoko. On dirait jours de marché dans mon village, chaque 3 jours.
Prési, rien ne va. Nin wendé, c’est vrai. Rien ne va. Mais, la cherté semble aujourd’hui notre dernier souci, au regard du mal sécuritaire qui nous assaille et nous accule de toute part.
Sur l’insécurité, je sais que ma voix sera inaudible devant ce tintamarre de détresse qui nous vient chaque jour des personnes déplacées internes et des zones en proie au terrorisme. Mais, je vais quand même parler.
Prési, désormais, notre pays est divisé, bref, pas divisé mais on a revu nos frontières à la baisse depuis quelques temps.
Prési, Kaya, Kongoussi, Seguenega, Ouahigouya, sont les nouvelles frontières à partir du septentrion burkinabè. En tout cas, derrière ces localités, on survie, sinon, il y a absence de vie paisible. Un habitant d’une localité située à une quarantaine de kilomètres de Ouahigouya me disait que leur village appartient désormais au Mali, car au Faso, depuis plus de 3 ans, aucune action n’a été faite pour leur venir en aide, face au défilé des terroristes. Aujourd’hui, ils ont négocié, trouvé des compromis, et ils vivent désormais sous les ordres des « barbus ». En contrepartie, leurs pantalons n’arrivent plus à la cheville. Allah Akbar !
Prési, on attend vraiment le bilan pour voir clair dans l’affaire de lutte antiterrorisme car, les 5 mois donnés en début février s’achèvent en juillet, dans ce mois de juillet, sinon en août.
Nin wendé, à l’heure là, personne ne sait ce que deviendra le Faso demain. On a résistés. On a été résilients. On a même applaudi votre ascension après avoir mis de côté le « Pharaon ». On se disait : « ce sont eux qui étaient sur le terrain et ce sont eux qui subissaient toutes les difficultés dans la lutte contre l’hydre terroriste. Étant au pouvoir, les terroristes vont tout de suite changer de planète parce qu’ils ont tout le pouvoir de décision entre leurs mains pour les faire périr. »
Mais, que nenni. Prési, demain l’avenir n’a qu’une seule couleur actuellement aux yeux de tous : noire. Tout est sombre. Comment convaincre une population que demain sera reluisant quand l’escalade de la violence ne cesse de s’accentuer dans le Sahel, le Centre-Nord, la Boucle du mouhoun, les haut-bassins, les Cascades, l’est, le nord, bref, dans presque toutes les régions du pays?
Presi, les morts se multiplient. Les cris de détresse sont la seule « mélodie » aujourd’hui. Prési, sommes-nous réellement en guerre? En tout cas, à Ouagadougou, on sirote, on danse et mange bien. Mais, à 100 kilomètres au nord ou à l’ouest, à l’est, l’appétit a foutu le camp. Là-bas on veut juste voir le soleil se lever demain encore. La vie s’efface, le Faso avec. Prési, en tout cas, ce n’est qu’une petite partie de ce que je voulais dire sur l’insécurité. Il y a trop de choses à dire, mais je vais m’arrêter là d’abord.
Koudpoko, rentrons chez nous, et prions beaucoup (musulmans, chrétiens et traditionalistes) pour ce pays qui agonise aujourd’hui…
In vino, Veritas est. Le client de Koudpoko n’a fait que dire ce qu’il pense. D’autres clients peuvent compléter ce qu’ils pensent, ajouter ou rectifier son propos mais le presi doit entendre…
Koudpoko, l’adresse au prési
Minute.bf