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vendredi 29 mars 2024

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Procès terroristes: « Nous n’esperions même pas sortir d’ici vivant… » (N.A.)

La première session de jugement de la Chambre correctionnelle spécialisée du pôle judiciaire spécialisé dans la répression des actes de terrorisme s’est poursuivi ce mardi 10 août 2021 au Tribunal de Grande Instance Ouaga-II. A la barre ce jour, N.A et D.A.H, tous membres du groupe terroriste Ansarul Islam du prédicateur Malam Dicko. Entre autres, ces derniers sont poursuivis pour associations de malfaiteurs, destructions volontaires de biens et vol aggravé après avoir attaqué l’école primaire de Bafani, dans la commune de Barsalogho, province du Sanmatenga, dans la région du Centre-Nord. Reconnus « coupables » par le tribunal, les prévenus ont chacun écopé de 20 ans ferme d’emprisonnement et du payement de dommages et intérêts à près de 5 millions.

A la question, « connaissez-vous le groupe Ansarul Islam? », N.A et D.A.H ont tous répondu « oui! ». Ils ont répété ce «oui! » à la question de savoir s’ils étaient des membres du groupe. Pour quoi faire? Les deux prévenus avancent la cause religieuse. Précisément, ils disent vouloir contribue à instaurer la charia afin que tout se déroule au Burkina, conformément aux prescriptions du coran.

Comment ont-ils été recrutés ?

N.A cultivateur est plutôt orpailleur selon ses dires pendant l’instruction. C’est dans ses activités d’orpaillage qu’il va avoir connaissance des prêches du groupes Ansarul Islam. Partant suivre régulièrement ces prêches, N.A va être séduit par le message pour finalement répondre à l’appel du groupe, en le rejoignant. En effet, si ce dernier dit n’avoir « jamais rencontré le chef du groupe Ansarul Islam, Malam Dicko», le procureur a révélé pourtant que les prêches qu’il partait suivre étaient en réalité animés par ce dernier.

Pour lui, il faut aller à la charia. « Je sais que le Burkina a ses lois mais elles ne conviennent pas avec ce qu’enseigne notre religion et si nous ne faisons rien, nous devrons rendre compte au jour du jugement dernier », s’est justifié la recrue de groupe « moudjahidine » Ansarul Islam, en français « Partisans de l’Islam ».

Quant à D.A.H, éleveur à la base, il dit avoir entendu parler du groupe et convaincu par ses objectifs, il l’a rejoint. Sauf qu’en réalité, c’est en partant paître ses animaux que ce dernier a été contacté par des membres du groupe Ansarul Islam, a rectifié le procureur, sur la base de ses déclarations à l’instruction. Il ressort que c’est lors de ses temps de pâturage que D.A.H a été convaincu par le groupe terroriste. Visiblement acquis à la cause du groupe, le berger a vendu un taureau pour s’offrir une kalachnikov à hauteur de « 430 000 F CFA ». Lui aussi, dit qu’il s’est fait enrôlé pour prôner la charia.

Ainsi, les deux mis en cause ont été enrôlés par le groupe Ansarul Islam. N.A dit avoir passé 8 mois en tout dans le groupe. « Pendant tout ce temps, je cuisinais, je lisais le coran, je puisais l’eau, je cherchais le bois de chauffe et au moment de la formation (militaire), je partais participer », a expliqué N.A, qui poursuit qu’il n’a opéré qu’une seule mission. Celle qui l’a conduit devant le tribunal.

D.A.H, lui dit avoir adhéré au groupe djihadiste en 2017 et a même pu rencontrer son chef Malam Dicko. « Je n’ai pas rejoint le groupe par manque d’emploi, ni d’argent. C’était volontaire et pour la religion », a déclaré celui qui s’est fait enrôler pour le « djihadisme ». C’est ainsi qu’ils vont participer à des attaques visant les symboles de l’Etat comme ce fut le cas à l’école primaire de Bafani, le 2 mai 2018.

Le 2 mai 2018 restera gravé dans la mémoire de l’école primaire de Bafani, située sur l’axe Barsalogho-Foubé. Ce jour, lendemain de la fête du travail, l’école va être visitée par les terroristes du groupe Ansarul Islam. Dans le commando de 6 membres venus 2 à 2 sur 3 motos, figuraient N.A et D.A.H.

« Ce jour, autour de 15h, j’étais assis devant ma porte, sous le hangar de mon appartement. Entre temps, j’ai entendu des bruits de moteurs et j’ai d’abord pensé aux Forces de Défense et de Sécurité (FDS). Mais après, sont apparus des hommes enturbannés avec un drapeau noir sur lequel il est écrit en arabe. J’ai commencé à réciter des sourates de protections en arabe : nous sommes tous venus de Dieu, nous allons tous repartir à lui. Il n’y a point de divinité que Dieu. Dieu est grand », retrace le Directeur de l’école D.A, surpris par les assaillants.

« Que récites-tu », lui questionne un des assaillants avant de lui faire « coucher à plat ventre, la face contre le sol ». « Ils m’ont demandé où se trouvait mon argent, je leur ai montré. Ils m’ont demandé où se trouvait la clé de ma moto. Je leur ai dit de regarder sur la porte. Un d’eux m’a donné un coup de pied à la tête et ils sont rentrés dans ma maison, ont tout renversé. Ils m’ont ensuite demandé si j’avais une arme à feu, j’ai dit non. Entre temps, j’ai entendu un bruit comme si on rechargeait une arme. J’ai aussi entendu parlé d’essence et d’incendie. La question que je me posais à cet instant était de savoir si c’était sur moi que cela allait être utilisé où sur autre chose », raconte D.A, qui, sous le choc de ce rappel, s’effond en larmes. Après cela, les agresseurs ont incendié la maison qui servait de domicile et de magasin au directeur de l’école primaire de Bafani. D.A perdait ainsi, « tous (ses) biens » dans l’incendie de sa maison.

Entre temps, l’enseignante C.B était également à son domicile, se reposant après avoir préparé son cours du lendemain, selon ses dires. Alertée par les bruits des motos, elle pense d’abord aux passants qui, dit-elle, « s’arrêtent souvent pour demander de l’eau à boire ». Mais elle va vite faire le constat du drapeau noir avec l’écriture arabe. « J’ai commencé à prier », raconte-t-elle alors que l’un des assaillants s’avançait vers elle. Elle aussi, sera mise au sol, « à plat ventre et à moitié nue ». « Nous avons dit d’enseigner l’arabe, si nous venons prochainement trouver que ce n’est pas le cas, vous aurez chaud », lui a lancé un de ses agresseurs avant de lui demander où se trouvait la clé de sa moto et son argent. C.B perdait ainsi sa moto, son téléphone et un numéraire « d’environ 10000 F CFA » au profit des agresseurs.

Pourquoi l’attaque de l’école de Bafani ?

« Nous avons été envoyés par notre chef pour une mission contre les Koglweogo (groupe d’autodéfense ) », diront les deux mis en cause. S’ils disent n’avoir jamais eu à faire aux Koglwéogo, ils disent s’opposer à leur pratique. « Les Koglwéogo ont des armes, des fusils mais ils se battent pour rien. Ils frappent les gens, leur imposent des taxes. Mais nous, nous nous battons pour la religion, l’application de la charia », a expliqué D.A.H sur leur opposition aux Koglwéogo. Ainsi, ces derniers disent avoir reçu pour ordre d’attaquer les Koglewéogo si jamais ils les apercevaient avec des armes. « On n’attaque pas de personnes désarmés », dira N.A, précisant qu’ils ont quitté un village de Nassoumbou, à plus de 100 kilomètres pour venir à Bafina.

Pourquoi l’attaque de l’école? Les mis en cause estiment que l’école classique n’enseigne pas selon les enseignements du coran. Ainsi, leur chef d’équipe (des 6) a décidé à leur retour de mission, qu’ils fassent escale à l’école. C’est ainsi qu’ils s’en sont pris au Directeur et à l’institutrice, incendiant la maison et le magasin du premier, lui volant son argent, sa moto et 3 téléphones. A l’enseignante, ils lui ont pris sa moto, son téléphone et de l’argent.

Après cette forfaiture, ces derniers vont se faire surprendre par les Kogleweogo, qui ont pu mettre la main sur N.A et D.A.H

Pour l’ensemble des actes qu’ils ont commis, N.A et D.A.H comparaissaient ce jour sous les chefs d’accusation d’association de malfaiteurs terroristes, détention illégale d’armes à feu et de munitions, destruction volontaire de biens et de vol aggravé en lien avec le terrorisme.

Des faits que les prévenus ont tous reconnu sauf celui du « vol ». « Nous ne sommes pas des voleurs », diront-ils, tour à tour. Dans la logique de N.A, « tous ceux qui sont dans la fonction publique sont du gouvernement », et que tout ce qui appartient à l’Etat est pour tout le monde. Ce dernier poursuit d’ailleurs en indiquant qu’il s’agit d’une « prise ». Pour lui, c’est le fruit d’un « combat ». « Dans un combat, c’est le vainqueur qui emporte les biens », se justifie-t-il sur les vols à eux reprochés.

En outre, quand le juge demande aux prévenus ce qu’ils pensent de savoir que des gens souffrent, sont obligés de quitter leurs villages pour se trouver en situation de déplacé interne avec les difficultés qui en découlent (faim, pauvreté…), ces derniers disent « avoir de la peine ». « Nous ne voulons pas que les gens souffrent, mais nous sommes obligés de faire ce que nous faisons. Il suffit juste qu’ils acceptent le coran comme seule loi », lâche N.A, qui tient mordicus qu’ils ne s’en prennent jamais aux populations civiles, désarmées. Piégé par le cas de Solhan, il répondra que c’est « un seul âne qui a mangé la farine et tous les autres ont la bouche blanchie ».

Sur ce, le procureur a requis 20 ans ferme d’emprisonnement dont 15 ans de sûreté contre les prévenus. Après suspension, cette sentence a été confirmée par les juges.

Mais avant, à la question de savoir ce que feront les deux terroristes à leur sorti: « je ne peux pas répondre à cette question tant que je suis en prison », a répliqué D.A.H. Quant à N.A, lui a déclaré : « nous n’esperions même pas sortir d’ici vivant. Nous nous sommes engagés, connaissant les risques. On pensait qu’on allait être condamnés et fusillés ». Le juge a tout de même rappelé à celui-là qui se dit prêt pour aller trouver « 70 vierges au paradis » que la peine de mort est abrogée au Burkina Faso.

Minute.bf

1 COMMENTAIRE

  1. Cette peine je ne l’imagine pas , mais exactement que feront-ils s’ils arrivaient à sortir de cette prison en vie ? Sûre qu’ils vont reprendre ce même chemin qui les à conduit en prison. Ils sont conscients du chemin qu’ils ont pris, et je n’ai jamais lu le coran mais je ne pense pas qu’il y’a un haddi qui leur dit de menancer, ou tuer d’autres humains pour instaurer la charia. On ne négocie jamais avec un terroriste, ils voudront toujours plus; même si ces enseignements de cette école avaient décidé d’inculquer aux élèves les lois qu’ils ont reçu. Bref ces amis terroristes pourront prendre des décisions très dangereux pour rendre justice aux leurs. Mais prendre la vie d’autres personnes, leur faire peur, pour instaurer sa dictature est une chose qu’il faut punir car ils profitent de cela pour se dire qu’ils sont de bon exemple, ce qui n’est pas le cas mais c’est une attitude vulgaire qu’un homme majeur puisse prendre.

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