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vendredi 19 avril 2024

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Assurance maladie universelle : « Toutes les prestations offertes dans un CSPS sont prises en charge… » (Dr. Yves Kinda, DG CNAMU)

La Caisse nationale d’assurance maladie universelle (CNAMU) est en branle depuis quelques années, pour rendre effective l’assurance maladie universelle au Burkina Faso. Pour le projet pilote, elle a axé son intervention sur les personnes indigentes. Le 25 septembre 2020, à Pabré, dans la région du centre, elle lançait officiellement la remise de carte d’assurés aux personnes indigentes. Une année après cette cérémonie, plusieurs actions ont été menées pour la concrétisation de ce projet gouvernemental. Dans cet entretien accordé à www.minute.bf, le Directeur général (DG) de la CNAMU, Dr. Yves Kinda dresse un bref bilan des actions menées par sa structure et détaille les avantages dont peuvent bénéficier toutes les personnes possédant la carte d’assurés.

Minute.bf : Quelle est la plage des prestations offertes à une personne possédant la carte d’assurés ?

Dr. Yves Kinda : Toutes les prestations offertes dans un Centre de Santé et de Promotion Sociale (CSPS) sont prises en charge à la seule exception que nous ne remboursons pas les médicaments de spécialité. Egalement, sur le niveau supérieur, nous couvrons toutes les prestations sauf les maladies chroniques ; que ce soit les consultations, la pharmacie, les interventions chirurgicales, les hospitalisations, le laboratoire, tout est couvert pour nos assurés.

Quel est le critère de sélection de ces personnes indigentes ?

Pour le critère de sélection, il est important de préciser que l’assurance maladie a pris l’option de ne pas s’occuper de la sélection. C’est un principe de bonne gestion qui peut se comprendre, parce qu’il y aura un conflit d’intérêts si nous devons nous-mêmes dire qui est indigent pour le prendre en charge ; vous retrouverez dans ce cas des membres de nos familles respectives sur les listes. Cela dit, nous avons confié les sélections à des ONG comme les ONG ASMADE, RAME. C’est aussi au Premier ministère qui a une activité de sélection, dans le cadre des activités du Secrétariat permanent du Conseil national de la Protection sociale (SP/CNPS), de ceux qu’ils appellent « des vulnérables ».

Au-delà des personnes indigentes, comment se fera l’accessibilité de tout Burkinabè à cette assurance maladie ?

Pour nous, est indigent en réalité celui qui ne peut pas payer ses dépenses de santé et qui ne peut pas cotiser à l’assurance maladie. La loi sur le régime d’assurance maladie dispose que l’État doit payer la cotisation de ces populations. Cela nous permet déjà d’écarter une question qui voudrait qu’on justifie le fait que nous commençons par les indigents et non les autres. C’est une option. Pour l’extension, il faut se préparer à de grandes discussions avec les partenaires sociaux (ce qui était déjà en cours) pour arrêter le niveau de contribution.

Des réunions vont intervenir dans les tout prochains jours pour lancer ce processus parce que nous travaillons sur la base d’instructions que nous recevons du gouvernement et nous allons aller prendre les orientations pour ensuite entamer des discussions. Nous allons reprendre les discussions pour qu’au cours de cette année, nous arrivions à nous mettre d’accord sur les conditions minimales d’extension de l’assurance maladie vers les populations solvables.

Depuis la cérémonie de lancement officiel de la couverture des personnes indigente à Pabré le 25 septembre 2020 jusqu’à ce jour, nous n’avons plus senti la caisse nationale d’assurance maladie bouger. Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez été confrontées au cours de cette période ?

Je me réjouis que vous disiez que c’est une impression parce que, lorsqu’une carte est donnée à un indigent, il y a un travail qui est fait en amont. Il faut aller le retrouver sur le terrain, s’assurer de son identité, s’assurer qu’il s’agit effectivement d’un indigent, s’assurer que la carte pourra servir à quelque chose pour négocier avec les formations sanitaires, passer les conventions, etc. Peut-être que la presse n’a pas beaucoup parlé de nous, mais cela ne veut pas dire que la caisse n’a pas travaillé.

La communication, nous la faisons lorsque nous allons sur le terrain. Nous vous invitons à venir voir et je puis vous assurer que notre personnel qui est d’ailleurs en sous-effectif travaille d’arrache-pied pour qu’à des moments périodiques, l’information se fasse sur le terrain.

Le travail de préparation à l’assurance maladie est quasiment plus important que le versement de prestations. Quand on arrive au stade de distribution des cartes et de versement de prestations, c’est dire que le plus gros du travail a été fait. Et cela se fait dans les bureaux et non sur le terrain. C’est de la conception pure.

Revenant aux difficultés, il faut reconnaître qu’elles ne manquent pas. J’ai tantôt parlé du sous-effectif. La caisse est en construction et nous manquons de certains outils. Nous sommes butés à la problématique de l’extension vers le secteur informel, ce qui n’est pas une petite affaire parce qu’il y a beaucoup d’éléments à prendre en compte. Il y a les difficultés financières, budgétaires comme dans tous les autres services publics de notre pays. Nous avons également la difficulté liée à l’informalité des populations.

Dans la région du Nord par exemple, où nous avons couvert les indigents, si nous avons mis du temps par rapport aux autres régions, c’est entre autres, en raison de l’insécurité qui ne facilite pas la recherche des indigents et le suivi du déplacement des populations rurales.

Vidéo – Plus de 65 000 personnes enrôlées à la Caisse nationale d’assurance maladie universelle

Est-ce qu’il y a un système mis en place pour permettre à toute personne qui possède la carte et qui se retrouve dans une autre région que sa région d’origine (pour une raison ou une autre) de bénéficier des prestations en cas de maladie ?

Cette question doit faire l’objet de conventionnement. Pour l’instant, nous ne sommes pas à là. Pour le démarrage, nous ne nous encombrons pas. Ce n’est pas trop compliqué, mais cela interviendra dans un second temps. Vous parlez de la portabilité de la carte. La caisse d’assurance maladie passe des conventions individuelles avec les formations sanitaires pour les populations de la région concernée. À terme, il y aura un système informatique qui nous permettra d’envisager cette solution de la portabilité de la carte.

Est-ce qu’il y a un coût maximum à ne pas excéder dans les prestations sanitaires offertes à chaque personne possédant une carte d’assurés?

Pas du tout ! Nous n’avons pas de plafonnement. Tant que le bénéficiaire est malade, nous le prenons en charge. Dans tous les cas, nous faisons confiance au système de santé. Si le professionnel de santé estime que pour traiter le patient, il faut telle prestation ou tel médicament, tant qu’il a en face de lui un indigent, nous ne procédons pas à un plafonnement.

Quel message particulier avez-vous à lancer à l’ensemble des populations burkinabè qui attendent impatiemment la concrétisation de ce projet sur le plan national?

J’invite tous les Burkinabè à la patience. L’assurance maladie a commencé par les populations qui ont moins la possibilité de s’exprimer, de manifester leur impatience. Ceux qui sont bénéficiaires de l’assurance maladie aujourd’hui sont dans le milieu rural et ce sont des personnes qui sont exclues du système. L’assurance maladie profite à des gens, travaille pour des gens, prend en charge des dépenses de santé pour les plus fragiles d’entre nous.

Malheureusement, la nature humaine est faite de telle sorte qu’une fois qu’on a annoncé quelque chose, on a une certaine impatience. Ceux qui ont le plus besoin du système ne peuvent pas l’exprimer, nous sommes obligés d’aller les chercher. Nous avons la chance que le gouvernement ait permis qu’on dégage du budget pour eux. Je pense qu’au lieu du mécontentement on devrait féliciter le gouvernement pour ce premier effort.

Maintenant, le grand enjeu chez nous, c’est de nous assurer que l’extension se passe assez rapidement, mais sans nous précipiter, parce que, même dans les pays les plus riches que nous, les régimes ne se sont pas construits en 10 ans. En France, cela existe depuis 100 ans, mais je peux vous assurer qu’il y a encore beaucoup de problèmes. La précipitation ne nous servira pas. Au contraire, cela nous fera prendre des risques inutiles. C’est un bel outil, mais c’est un outil qu’il faut construire avec patience et prudence.

Propos recueillis par Armand Kinda
Minute.bf

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